Mort de Jean Ferrat : Une douleur unanime et des réactions émues, tandis que son cher village attend ses obsèques mardi...
Publié le 14 mars 2010 à 13:53
Par Guillaume J.
Jean Ferrat, l'Ardéchois, l'humaniste, le poète révolté, est décédé samedi 13 mars 2010. "Sa" France est bouleversée, et son village d'Antraigues le veillera pour l'éternité après ses obsèques mardi 16 mars... Jean Ferrat, l'Ardéchois, l'humaniste, le poète révolté, est décédé samedi 13 mars 2010. "Sa" France est bouleversée, et son village d'Antraigues le veillera pour l'éternité après ses obsèques mardi 16 mars...© Angeli
Jean Ferrat, l'Ardéchois, l'humaniste, le poète révolté, est décédé samedi 13 mars 2010. "Sa" France est bouleversée, et son village d'Antraigues le veillera pour l'éternité après ses obsèques mardi 16 mars...
Jean Ferrat, l'Ardéchois, l'humaniste, le poète révolté, est décédé samedi 13 mars 2010. "Sa" France est bouleversée, et son village d'Antraigues le veillera pour l'éternité après ses obsèques mardi 16 mars...
Jean Ferrat, l'Ardéchois, l'humaniste, le poète révolté, est décédé samedi 13 mars 2010. "Sa" France est bouleversée, et son village d'Antraigues le veillera pour l'éternité après ses obsèques mardi 16 mars...
Jean Ferrat, l'Ardéchois, l'humaniste, le poète révolté, est décédé samedi 13 mars 2010. "Sa" France est bouleversée, et son village d'Antraigues le veillera pour l'éternité après ses obsèques mardi 16 mars...
Jean Ferrat, C'est beau la vie (1964)
Jean Ferrat, l'Ardéchois, l'humaniste, le poète révolté, est décédé samedi 13 mars 2010. "Sa" France est bouleversée, et son village d'Antraigues le veillera pour l'éternité après ses obsèques mardi 16 mars...
Jean Ferrat, l'Ardéchois, l'humaniste, le poète révolté, est décédé samedi 13 mars 2010. "Sa" France est bouleversée, et son village d'Antraigues le veillera pour l'éternité après ses obsèques mardi 16 mars...
Jean Ferrat, l'Ardéchois, l'humaniste, le poète révolté, est décédé samedi 13 mars 2010. "Sa" France est bouleversée, et son village d'Antraigues le veillera pour l'éternité après ses obsèques mardi 16 mars...
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Jean Ferrat, l'Ardéchois, l'humaniste, le poète révolté, est décédé samedi 13 mars 2010. "Sa" France est bouleversée, et son village d'Antraigues le veillera pour l'éternité après ses obsèques mardi 16 mars...
Jean Ferrat, l'Ardéchois, l'humaniste, le poète révolté, est décédé samedi 13 mars 2010. "Sa" France est bouleversée, et son village d'Antraigues le veillera pour l'éternité après ses obsèques mardi 16 mars...
Jean Ferrat, l'Ardéchois, l'humaniste, le poète révolté, est décédé samedi 13 mars 2010. "Sa" France est bouleversée, et son village d'Antraigues le veillera pour l'éternité après ses obsèques mardi 16 mars...
Jean Ferrat, l'Ardéchois, l'humaniste, le poète révolté, est décédé samedi 13 mars 2010. "Sa" France est bouleversée, et son village d'Antraigues le veillera pour l'éternité après ses obsèques mardi 16 mars...
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"Et comme une louve/Aux enfants frileux/La nuit nous recouvre/De son manteau bleu": après l'extase divine et la langue charnelle, puissamment matérialisés par la chanson coïtale L'amour est cerise à laquelle sont empruntés ces vers, Jean Ferrat ne nous laisse que la tristesse, le silence, la pénombre. Post coitum animal triste.

Oui, aujourd'hui nous sommes les enfants frileux de la chanson française ; nous avons froid, après la jouissance de cet homme-là. Sa disparition, ce samedi 13 mars 2010, est celle d'une authentique institution, faite de combat et d'amour, d'intégrité intellectuelle et de tendresse, de conscience politique et citoyenne suraiguë et indomptable et de luxuriance poétique. Un humanisme si enraciné et si exhaustif que les réactions à la mort de l'interprète des merveilleuses La Montagne, Potemkine, Aimer à perdre la raison, et autres chansons atemporelles affluent de toutes parts, comme vous pouvez le découvrir ci-dessous...

Derrière l'artiste bucolique et le poète révolté, l'homme fatigué, abîmé par la maladie...

C'est à quelques kilomètres du village ardéchois d'Antraigues-sur-Volane, dont il avait fait sienne la terre et la pierre depuis des lustres et qu'il n'aurait quitté pour rien au monde (vous avez pu le découvrir dans son élément dans l'hommage, ému à n'en savoir que dire, que nous lui avons rendu hier), que le poète a, lui aussi, "quitté le pays". Parti mal gré, a contrario des acteurs de l'exode rural qu'il décrit dans La montagne, chanson inspirée par Antraigues qui est une ode d'une tendresse infinie à l'attachement au terroir et à l'histoire en même temps qu'une complainte acerbe sur l'évolution de notre civilisation - s'il constatait l'arrivée de l'automne, la chanson française se sait désormais en hiver.

Décédé samedi après-midi (13h30) à l'hôpital d'Aubenas, où il était suivi depuis des années et avait été admis "dans un état très détérioré" selon les spécialistes qui l'ont pris en charge, Jean Ferrat restera à Antaigues pour l'éternité à l'issue de ses obsèques, qui y auront lieu, avec la montagne pour témoin stoïque, mardi 16 mars, à partir de 14h30.

Jean Ferrat souffrait d'une longue maladie, et avait été admis en service de réanimation : "le médecin a tout de suite vu que cela allait être difficile", commente-t-on du côté de l'hôpital d'Aubenas, sans confirmer s'il s'agissait bien d'un cancer des poumons. La thèse d'une chute fatale que le chanteur aurait faite de son lit d'hôpital est niée par le médecin, mais confirmée par les proches et notamment l'attaché de presse Fabien Lecoeuvre.

Auteur et compositeur de plus de 200 chansons fières de poésie et d'engagement, Jean Ferrat était entouré de ses intimes, à sa mort. S'il avait perdu son épouse Christine Sèvres en 1981 (20 ans après leur union et leur duo sur La Matinée), date à partir de laquelle il avait cultivé une véritable retraite médiatique, Ferrat avait à ses côtés, depuis des années, Colette, sa nouvelle compagne.

Isabelle Aubret, sa grande complice, pleure son "Tonton"...

Isabelle Aubret, sa grande complice musicale depuis le début des années 1960, pour qui il avait écrit de nombreuses chansons dont Deux enfants au soleil et C'est beau la vie, avait communiqué la funeste nouvelle en marge de la tournée Age tendre et têtes de bois dont elle est une des protagonistes et où la suivait Gérard Meys, leur agent commun. A Tours, sur scène, elle a rendu hommage à son immense ami, interprétant Ma France et C'est beau la vie, après avoir annoncé le drame au public : "J'ai une triste nouvelle à vous apprendre. Celui que j'appelle "Tonton", c'est-à-dire Jean Ferrat, est maintenant au ciel".

Elle s'est émue par ailleurs : "Je perds un ami. Je perds l'ami. Le public aussi a perdu un ami. C'est une déchirure après tant d'années, de bons temps et de belles chansons. J'ai chanté pour lui dans l'après-midi avec le public et je vais rechanter ce soir. Je ne sais pas s'il y a un au-delà, mais je dois être forte pour qu'il soit fier de son petit soldat."

Entre idéal politique et poésie vitale, des réactions bouleversées de tous horizons

Si Nicolas Sarkozy a déploré la disparition, avec son chantre, d'une "conception intransigeante de la chanson française" propre à "transporter les âmes et les coeurs", les personnalités de gauche n'ont pas tardé à faire part de leur vive émotion. "Communiste de coeur, pas de carte", comme il le martelait en vain, Jean Ferrat avait rappelé à plus d'une reprise que son compagnonnage sympathisant avec le PC trouvait son fondement dans une blessure d'enfance : né en 1930, le jeune Jean Tenenbaum avait connu la déportation de son père dès le début de la guerre. Ce dernier ne reviendra jamais d'Auschwitz, mais Jean échappera à un sort funeste grâce à la protection de communistes, "des hommes formidables qui ont eu une action formidable". Habité par "l'idée communiste", la seule à s'élever contre le colonialisme et le capitalisme, Jean Ferrat le Camarade ne fut jamais encarté, n'était pas "un béni oui-oui" du parti, et son esprit critique s'appliquait également à la manière dont cette idée était défendue : en 1980, sa chanson Le Bilan (sur l'album Ferrat 80) en témoigne et crée un bref froid avec le PCF. En 2003, lors d'un passage sur le plateau de Michel Drucker, il avouera qu'il lui reste "un fond d'utopie" mais déplorera que "l'idéal de justice et de solidarité" ait été "dévoyé par ceux qui étaient censés l'incarner", ce qui était pour lui "la tragédie du XXe siècle". Des moments qu'on devrait d'ailleurs revoir dès aujourd'hui, puisque Michel Drucker a décidé de consacrer ses émissions Vivement dimanche et Vivement dimanche prochain (qui devait accueillir Dorothée) au regretté, avec des images du Vivement dimanche de 2003 et d'autres issues de Stars 90 en 1991. L'animateur vedette est évidemment sous le choc de cette perte : "Jean était un ami très proche depuis 45 ans. Il était le dernier des grands après Ferré, Brel et Brassens... (...), Il a quitté ce métier très tôt, dès 1975, dès qu'il a constaté qu'il devenait une industrie (...) Sa santé avait décliné ces deux dernières années", "il était très démoralisé, très anxieux, très inquiet".

A noter que les chaînes du service public prolongeront l'hommage : France 3 lundi soir en prime time, France 2 mardi en deuxième partie de soirée.

L'hommage de la gauche a une conscience citoyenne qui avait bravé la censure

Cette étiquette communiste et ses prises de paroles virulentes en chansons lui valurent de faire l'objet de nombreuses censures : Nuit et Brouillard (1963), chanson à la poésie tranchante à la mémoire des déportés, fut "déconseillée" et non diffusée par les radios, Potemkine interdite, tout comme Ma France, Au printemps de quoi rêvais-tu et Un air de liberté... Martine Aubry a salué le "militant infatigable de la justice sociale" qui "aimait sa France" et "incarnait la difficile synthèse entre la révolte et l'idéal" ; Marie-Georges Buffet, Premier secrétaire du PC, a rappelé que "tant de personnes" lui sont "redevables de tant de souvenirs intimes ou collectifs" : Robert Hue, qui se souvient de "l'immense honneur" que lui fit Ferrat, enlisté à ses côtés aux européennes de 1999 (en 2010, Ferrat avait apporté via ses proches son soutien à la liste Front de Gauche du PCF), a voulu souligner qu'il a "chanté la France comme personne, la vie des petites gens", signalant qu'il avait "une santé fragile et avait toujours eu des problèmes au niveau pulmonaire".

Une détresse unanime

De nombreuses personnalités du showbiz ont témoigné leur affliction en apprenant le décès de Ferrat, dont la dernière compilation en date, Les N°1 de Jean Ferrat, riche de 57 chansons de légende et parue en octobre en 2009, était encore en tête des ventes (250 000 exemplaires depuis sa sortie). "Un homme fidèle à ses convictions" et "en symbiose totale avec ce qu'il était" pour Pierre Perret, qui se rappelle leurs galères communes et le trac dévorant de Ferrat lorsqu'il faisait de la scène, "un auteur immense et un homme d'une gentillesse admirable" pour Line Renaud, "un des mousquetaires de la chanson française" et "un pur" pour Mireille Mathieu, une communion de "philosophie" pour Georges Moustaki, admiratif de la poésie d'un "homme engagé mais pas un hurleur de sentences" dont chacun connaît la voix, aussi majestueuse, placide et enveloppante que sa révolte d'artiste était synonyme de cri.

A Antraigues, la vue sur "La Montagne" est embuée de larmes...

A Antraigues-sur-Volane évidemment, le chagrin est aussi authentique que le fut celui qui le suscite. "Il voulait vivre la même vie que chacun des villageois", pointe le maire Michel Desenti, particulièrement touché, qui a encore en tête la "grande sensibilité, la vraie gueule", et le "regard particulier, profond, qui en disait plus que les mots" de son défunt voisin.. Le plus Ardéchois des Ardéchois se mêlait aux parties de pétanque du village, quand il ne sirotait pas son verre de sirop de cassis, même si ces rites simples d'un épicurien éminemment bucolique étaient dernièrement contrariés par sa santé : "Depuis quelque temps, on sentait qu'il était fatigué, il n'avait pas envie de sortir de chez lui et c'est sa compagne Colette qui s'occupait des courses", confie la patronne du café où Jean avait ses habitudes.

Fidèle à lui-même et à son amour terrien, Jean Ferrat ne quittera jamais Antraigues, qui attend désormais de veiller son poète, qui a cessé d'être révolté, pour l'éternité. "Tout ce qui tremble et palpite/Tout ce qui lutte et se bat (...) Pouvoir encore regarder/Pouvoir encore écouter" : à nous désormais, les survivants, de cultiver ce "fond d'utopie" qui promettra l'éternité à un hymne indispensable à l'humain - "C'est beau la vie".

Guillaume Joffroy

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