Le prince Dimitri Romanovitch avait fait du royaume de Danemark la dernière terre d'accueil de sa vie d'exilé, et c'est là, à Copenhague, que ses proches se sont rassemblés pour lui dire adieu : deux semaines après sa mort à l'âge de 90 ans dans la soirée du 31 décembre 2016, survenue dans un hôpital où il avait été admis à la suite d'une soudaine dégradation de son état de santé, ses obsèques ont été célébrées cette semaine dans la capitale danoise.
Deux ans après la mort de son frère aîné Nicolas Romanovitch, la Maison Romanov, dont le prince Dimitri avait alors repris la tête, est à nouveau endeuillée. Mardi 10 janvier, une messe de funérailles a été dite en l'église russe orthodoxe Saint Alexander Nevsky, à la mémoire de celui qui avait justement reçu en octobre 2016 à Moscou l'ordre d'Alexandre Nevsky – résurrection de l'ordre impérial du même nom aboli en 1917 par les bolcheviques. Cet honneur réservé par la Russie aux plus grands serviteurs de la Mère Patrie lui avait été accordé par le président Vladimir Poutine et remis par le Premier ministre russe Dimitri Medvedev, lequel a été très attristé d'apprendre quelques semaines plus tard sa disparition : "C'était l'un de nos plus formidables compatriotes. Au cours de nos rencontres en face-à-face, je prenais conscience un peu plus à chaque fois qu'il ne s'était jamais éloigné de la Russie et qu'il aidait toujours sa patrie par des actions concrètes", avait-il alors réagi.
Autour de la princesse Theodora (née Dorrit Reventlow), veuve du prince Dimitri, nombreux sont ceux qui s'étaient déplacés de loin pour l'adieu à ce descendant direct du tsar Nicolas Ier de Russie : "Un chapitre important de notre histoire commune a touché à son terme. Dimitri Romanovitch a fait énormément pour restaurer et fortifier les liens entre la diaspora russe et la Russie", a considéré mercredi 11 janvier auprès de l'agence de presse Tass, à l'issue de l'inhumation du prince au cimetière de Vedbaek (au nord de Copenhague), Nikolai Dobrynin, un proche du défunt venu tout spécialement d'Espagne.
Fils cadet, né en 1926 quatre ans après Nicolas, du grand-duc Roman Petrovitch, cousin du tsar Nicolas II, Dimitri Romanovitch a passé une dizaine d'années en France, où il a été élevé dans la culture russe, avant que sa famille s'installe en Italie au milieu des années 1930. A la fin de la Seconde Guerre mondiale, le clan, menacé et contraint à la clandestinité en raison de ses affinités avec la famille royale italienne, s'exile en Egypte, où le jeune Dimitri travaille un temps comme mécanicien dans une usine Ford. Le renversement en 1952 du roi Farouk rendra à nouveau la situation des Romanov délicate, entraînant son retour en Italie. Un an après son mariage avec Johanna von Kauffman, en 1959 à Copenhague, le prince Dimitri Romanovitch s'installe au Danemark, où il effectuera toute une carrière dans le milieu bancaire, jusqu'à sa retraite en 1993. Cette année-là, veuf depuis quatre ans, il épouse en secondes noces la comtesse Dorrit Reventlow (elle-même veuve depuis 1985) à Kostroma, ville où avait eu lieu le couronnement de Michel Ier de Russie, premier tsar de la famille Romanov. Il s'agit de la première union d'un Romanov sur le sol russe depuis la révolution de 1917.
S'il n'a pas eu d'enfants, le prince Dimitri Romanovitch avait le sens de la famille et de l'altruisme, s'investissant d'une part dans la perpétuation de l'histoire de la dynastie au sein de l'Association de la famille Romanov dont son père avait posé les fondements de son vivant, et d'autre part dans diverses actions philanthropiques en faveur du peuple russe, en particulier auprès d'hôpitaux et d'orphelinats. L'Association avait d'ailleurs acté en 1992 à Paris la création d'un fonds caritatif pour la Russie, dont il était le directeur. Il avait par la suite instauré en 2006 un autre fonds en son nom propre.