Mais jusqu'où ira la polémique sur la 88e cérémonie des Oscars ? Menacée de boycott par diverses personnalités (Spike Lee, Jada Pinkett Smith...) à cause de l'absence d'acteurs de couleurs dans la liste des nommés, elle suscite aujourd'hui des commentaires tous azimuts. Tour à tour, Charlotte Rampling, Michael Caine et Julie Delpy s'y sont risqués...
Nommée à l'Oscar de la meilleure actrice pour le film 45 ans, Charlotte Rampling n'a pas manqué d'être interrogée aux prémices de la polémique. Malheureusement, elle a tenu des propos très maladroits... "Peut-être que les acteurs noirs ne méritaient pas d'être dans la dernière ligne droite ?", avait-elle notamment déclaré sur Europe 1. La star avait également évoqué son refus de classer les acteurs par minorités ("lui il est moins beau, lui il est trop noir, lui il est trop blanc") tout en fustigeant dans ce boycott ce qu'elle soupçonne d'être un "racisme anti-blancs".
Face à l'ampleur du tollé, Charlotte Rampling a tenu à clarifier sa pensée. "Je regrette que mes commentaires aient pu être mal interprétés cette semaine dans mon interview avec Europe 1. Je voulais simplement dire que dans un monde idéal, les performances seraient toutes considérées à opportunités égales. Je suis honorée de faire partie du merveilleux groupe d'acteurs et d'actrices nommés cette année", a-t-elle dit à CBS News.
Après la sortie de Charlotte Rampling, le comédien deux fois oscarisé Michael Caine s'est lui aussi engouffré dans le débat. "Il y a beaucoup d'acteurs noirs. Vous ne pouvez pas voter pour un acteur parce qu'il est noir. Vous ne pouvez pas juste dire : 'Je vais voter pour lui. Il n'est pas très bon mais il est noir.' Vous devez donner une bonne performance, et je suis certain qu'ils étaient très bons. Soyez patients. Evidemment, cela viendra. Cela m'a pris des années pour avoir un Oscar", a-t-il déclaré à l'émission Today de BBC Radio 4.
Autre personnalité du cinéma avoir tenu un discours mal perçu : l'actrice et réalisatrice Julie Delpy. La Française a mis dans le même sac la cause des femmes et celle des minorités ethniques. "Il y a deux ans, j'ai fait une réflexion sur l'Académie des Oscars principalement composée de mâles blancs, ce qui est la vérité, et j'ai été conspuée par les médias. (...) Parfois, je me dis que j'aimerais être une Afro-Américaine parce que les gens ne leur font pas de réflexion. Le plus dur, c'est d'être une femme", a-t-elle affirmé alors qu'elle prenait part au festival de Sundance. De toute évidence, la star semble méconnaître l'énorme problème de racisme dont souffre l'Amérique, en témoignent par exemple les multiples meurtres de jeunes Noirs par des policiers et les vagues de protestations partout dans le pays... Face au tollé provoqué par ses propos, elle a vite tenté de corriger le tir par le biais d'un communiqué : "Je suis totalement désolée pour la façon dont je me suis exprimée. Il n'était pas du tout question de minimiser l'injustice faite aux artistes afro-américains et aux autres qui luttent pour l'égalité des chances et des droits, bien au contraire. Tout ce que j'essayais de faire, c'était de pointer du doigt les problèmes d'inégalité de chances dans le milieu dont les femmes sont aussi victimes (vu que je suis une femme). Il n'a jamais été dans mon intention de sous-estimer le combat de qui que ce soit ! (...) Encore une fois, je suis vraiment désolée pour ce malencontreux malentendu. Les gens qui me connaissent savent parfaitement que je ne tolère pas l'inégalité ni l'injustice, quelle qu'elle soit."
Afin d'éteindre l'incendie, l'Académie des Oscars a pris des mesures historiques : "doublement d'ici 2020 de ses membres féminins ou provenant de minorités ethniques" et "les nouveaux membres n'auront le droit de vote que pour dix ans et non plus à vie, et ce droit ne sera renouvelé que si les membres ont été actifs au cinéma pendant la décennie en question. Le droit de vote à vie ne sera obtenu qu'au bout de trois décennies actives dans l'industrie ou après l'obtention d'une nomination ou d'un Oscar." Une manière de renouveler plus souvent les votants pour éviter de ne voir figurer que de très vieux monsieurs (qui représentent actuellement 76% des votants !) réfractaires aux évolutions de la société et à la modernité...
Thomas Montet