C'est la bouleversante histoire d'une femme qui se sait condamnée par la maladie et qui se battra jusqu'au bout pour tenter de se faire entendre. Anne Bert, 59 ans, est écrivaine et directrice de collection érotique. Fin 2015, les médecins lui avaient diagnostiqué la maladie de Charcot, une pathologie neurologique qui la prive progressivement de l'usage de ses muscles. "Aujourd'hui, ça évolue beaucoup trop vite, puisque je ne peux déjà plus me servir ni de mes mains, ni de mes bras. Je sais que je n'ai aucun espoir de vivre, je sais que je vais mourir", avait-elle déclaré fin mars devant les caméras de France 3.
Mardi 11 avril, le journal Libération lui consacre un portrait, sobrement titré "Celle qui veut mourir vous salue". L'occasion pour Anne Bert de s'engager un peu plus dans le débat autour de l'euthanasie. En janvier dernier, elle avait publié sur son blog une lettre ouverte aux candidats de l'élection présidentielle, réclamant le droit de "choisir sa fin de vie". "Les équipes de Mélenchon, de Hamon et de Macron lui ont répondu. Le leader de la France insoumise prône le droit à éteindre la lumière, l'élu PS parle d'aide médicale et de mort dans la dignité et En marche ! est à l'arrêt sur la question", écrivent nos confrères.
J'en veux énormément à François Hollande
Selon un sondage Ifop, 95% des personnes seraient favorables à l'euthanasie. Il y a plus de cinq ans, François Hollande en avait d'ailleurs fait l'une de ses promesses électorales. Sans résultat. "Je lui en veux énormément. C'est de sa responsabilité si je suis dans cette situation de hors-la-loi", a-t-elle déclaré. "Hors-la-loi" car Anne Bert a choisi son destin : le moment venu, en accord et avec le soutien de sa famille et de ses proches, elle se rendra en Belgique pour rendre son dernier souffle. Là-bas, l'euthanasie est légalisée depuis déjà 2002, tandis que la France "n'a fait que gribouiller des mots d'excuses autorisant, pour les patients en fin de vie, la sédation jusqu'au décès".
Mais avant de partir, Anne Bert compte bien poursuivre le combat. "C'est une petite chèvre, Anne, un daguet. Ça peut être beaucoup plus dangereux qu'un cerf", a prévenu son époux et père de sa fille Roxane, Rémy Guichard. Déterminée à "trucider les concepts judéo-chrétiens de la souffrance rédemptrice, hissant haut l'étendard de la liberté de choix", Anne Bert n'a pas encore dit son dernier mot. "Je ne pense pas que souffrir apporte quelque chose. Ça ne fait pas grandir. (...) Pourquoi y a-t-il des tracteurs aussi violents contre la légalisation de l'euthanasie ? C'est dans la majorité des cas des questions religieuses. Il faut souffrir jusqu'au bout, comme si la souffrance allait pouvoir vous révéler quelque chose avant votre dernier souffle", déclarait-t-elle encore fin mars à France 3.
Déplorant le mutisme des politiques, Anne Bert avait conclu son entretien en espérant que "les gens et la population" élèvent un jour la voix pour plaider le droit à l'euthanasie. "Ça nous concerne tous. Ça concerne tout le monde."