Cet été, il publiait chez Robert Laffont Un jour je partirai, sans en avoir tout dit. En remportant son combat contre la maladie, Jean d'Ormesson, 88 ans, a gagné un peu de ce temps précieux. L'écrivain délicieux, lauréat du prix Scopus 2013, et Immortel évoquait ce matin sur RTL le cancer contre lequel il luttait depuis le printemps dernier. Un cancer désormais en rémission.
En toute discrétion depuis des mois, Jean d'Ormesson a mis toute ses forces à guérir : "Je n'ai jamais pensé à la mort, dit-il. Je pensais simplement à guérir." Il n'avait rien dit jusqu'à aujourd'hui. Ce mardi matin au micro de Bernard Lehut, Jean d'Ormesson cite cette phrase de Vauvenargues : "Il est indigne des grandes âmes de faire part des troubles qu'elles éprouvent." Une phrase refuge, mais l'écrivain ajoute : "C'est pas que je me prenne pour un grande âme, non. Mais je suis de l'avis de Vauvenargues, on ne parle pas de ça..."
"Si j'en parle, c'est simplement pour me dire qu'il y a des gens plus malheureux que moi et la leçon que ça m'a donné, c'est que j'ai senti à quel point j'étais privilégié. [...] Ce n'est pas seulement une question d'argent. Je pense aux gens qui sont malades et qui ne connaissent personnes : qu'est-ce qu'ils font ? [...] C'est effrayant. Vous savez je suis sorti de cette épreuve avec les idées que j'avais en y entrant, mais... socialement, avec une teinture d'extrême gauche. Les gens sont malheureux, vous savez. Et évidemment, il faut absolument essayer de rétablir l'égalité des chances, d'abord au début de la vie, ensuite à l'école, et ensuite à la fin de la vie, dans la maladie. Le système hospitalier français est probablement le premier au monde, vous savez. Mais il faut faire attention !"
De cette expérience, l'écrivain en ressort renforcé dans ses convictions : "Ça m'a appris la force de l'amour et que les sentiments les plus simples qui sont la sympathie, l'amitié et l'altruisme dont parle si bien Mathieu Ricard dans un très beau livre, et bien, tout ça, c'est des formes de l'amour." Mathieu Ricard est le fils du philosophe, essayiste, journaliste et académicien Jean-François Revel. Ce moine bouddhiste - qui était hier soir sur le plateau du Grand Journal - publie ce mois-ci son Plaidoyer pour l'altruisme, la force de la bienveillance. De la bienveillance, Jean d'Ormesson en a ressenti à l'hôpital qu'il a quitté presque à regret : "J'en garde un merveilleux souvenir. Je leur ai dit que j'étais très triste de partir d'ici parce que les gens sont formidables, formidables, tous !"
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