Après une tournée triomphale, l’Étienne Daho Show, en 2024 le chanteur breton a conclu l’année dernière en beauté en recevant, en novembre, le Grand Prix spécial de la Sacem dédié à “des parcours artistiques d’exception et rendant hommage aux talents qui façonnent la création musicale en France”. Cette récompense a agi comme un baume au cœur pour Étienne Daho qui, après le départ de Jane Birkin en 2023, a très douloureusement vécu la mort de son autre amie Françoise Hardy, en juin dernier.
Pour se consoler, le sexagénaire a heureusement la chance de disposer d’un havre de paix unique dans le XVIIIe arrondissement de Paris, en plein quartier des Abbesses, à Montmartre. Un lieu qu’il connaît de longue date car, comme il l’a confié au podcast Le Goût de M en décembre 2022, “mes grands-parents habitaient place Blanche, mes tantes y avaient une brasserie, j'ai toujours été dans ce coin-là”. Il a découvert le rock’n’roll à quelques dizaines de mètres, au 90 boulevard de Clichy, dans la mythique salle de la Locomotive, qui accueillait à l’époque beaucoup de groupes anglais, avant que sa propre carrière ne décolle en 1984 avec la chanson Week-end à Rome.
Mais bien qu’il adore l’Angleterre, où il a longtemps vécu, à Paris c’est bien le rêve américain que vit Étienne Daho au quotidien ! Il y a trente-huit ans maintenant, il a acheté à Montmartre un chalet en bois rustique ayant un temps hébergé… Buffalo Bill. Le chasseur de bisons et homme de spectacle, né dans l’Iowa, y a vécu en 1905 lors d'une tournée ayant traversé plus de cent villes françaises.
À Paris, son cirque s’est produit plusieurs semaines à l'Hippodrome de Montmartre, en bas de la rue Caulaincourt, à deux pas de Montmartre. Buffalo Bill se partageait alors entre l'hôtel Terrass et l’actuel domicile d’Étienne. Le spectacle de l’Américain sera ensuite présenté au pied de la tour Eiffel et attirera, au total, trois millions de spectateurs. "J'habite dans cette maison depuis 1987, a expliqué Daho dans les pages du magazine Harper's Bazaar il y a deux ans. Je n'avais pas d'argent à l'époque pour me la payer, mais j'ai eu la chance de sortir tout de suite après un album qui a très bien marché (Pour nos vies martiennes en 1988, NDLR) et j'ai pu me l'offrir. C'est ma base, mon refuge."
Depuis il n'a jamais imaginé revendre son chalet. Même si ses amis Jacques Dutronc et Françoise Hardy l’ont incité à lui faire une infidélité il y a quelques années. "Ils m'avaient encouragé à acheter un appartement avenue Foch. J'ai détesté. Quand je rentrais dans ma rue le soir, j'avais littéralement les épaules qui tombaient. Je n'avais rien à foutre là-bas. J'ai revendu." Dans le quartier des Abbesses, au détour d'une petite rue pavée, Étienne aime se moquer de la modestie de sa maison. “Les gens la pointent souvent du doigt, pas parce qu'elle est belle — c'est certainement la façade la plus pourrie de la rue — mais parce que cette maison a une histoire”, souriait-il dans Le Goût de M en 2022.
À l'intérieur, “c'est comme un intestin” s’amusait le propriétaire en citant Jeanne Moreau, autre chère amie disparue, qui aimait décrire ainsi cet ancien atelier d'artiste sinueux et plein de couloirs au premier niveau. À l’étage, on trouve un grand salon “où l'esprit de Buffalo Bill flotte peut-être encore… ”, fantasme Daho. Une grande bibliothèque est habitée par les livres que préfère le natif d’Oran (Algérie), ceux d’Arthur Rimbaud, Andy Warhol, Pierre et Gilles ou encore ceux consacrés à Marilyn Monroe, dont il nourrit la passion.
Sans être dépensier, celui qui a grandi à Rennes avoue son amour immodéré des belles demeures. “J'ai failli acheter la maison où Marilyn est morte aux États-Unis, qui était à vendre pour très peu. Je suis fasciné par les maisons, que ce soit la Villa Malaparte, l'appartement de Syd Barrett [membre de Pink Floyd], l'atelier de Bacon…” Peu matérialiste, il a meublé son salon de deux canapés, de poufs carrés crème et de disques. “Tout en bois, comme dans Twin Peaks.”
À 68 ans, il aime se ressourcer dans son antre chéri pour penser aux artistes qu’il a aimés et qui ne sont plus là : Syd Barrett, Jane Birkin, la chanteuse Dani… En 2013, il confiait au magazine Marianne sa difficulté à accepter leurs départs : “J’en ai marre que tout le monde meurt, Jacno, Daniel [Darc], Fred [Chichin], Alain [Bashung], il faut s'arrêter là.” Le 10 janvier dernier, on a fêté les 108 ans de la mort de Buffalo Bill. Peut-être, ce jour-là, Étienne a-t-il conversé avec le fantôme du mythique cavalier…