"Mon petit-fils est gay et juif." C'est par ces mots qu'Omar Sharif, célèbre comédien égyptien d'origine libanaise, avait apporté son soutien à son petit-fils Omar Sharif Jr. En mars 2012, le jeune homme faisait son coming out dans un article édifiant paru dans le magazine The Advocate. "Je suis Égyptien, je suis juif, et je suis gay", lâchait-il. Son grand-père, aujourd'hui âgé de 82 ans, avait alors pris la parole, évoquant "un jeune homme mature" qu'il soutenait de tout son coeur : "Personne n'a le droit de contrôler ses actions ou de limiter sa liberté."
Homosexuel, Omar Sharif Jr., né au Canada avant de passer son adolescence entre Paris, Montréal et Le Caire est aujourd'hui installé aux États-Unis où il tente de devenir acteur. Il a pris la décision de porter haut les couleurs du mouvement LGBT auquel il apporte un soutien à la fois militant et politique. Pendant que d'autres luttent pour permettre le mariage entre personnes de même sexe ou l'adoption pour les couples gays, il se fait le porte-parole d'une communauté obligée de vivre dans le silence. "J'écris cet article dans la peur. Peur pour mon pays, pour ma famille et pour moi-même. Mes parents seront choqués de le lire, ils auraient sûrement préféré que cela reste dans l'ombre et dans le silence. Mais je n'en peux plus", écrivait alors Omar Sharif Jr, 29 ans seulement au moment de la publication.
Aujourd'hui engagé pour sa cause, Omar Sharif Jr. la défend à sa manière, sous le feu des projecteurs. Le 17 novembre, il était l'un des invités de The Weinstein Compagny à la première d'Imitation Game à New York. Un film qui n'est pas sans rapport avec son combat : le biopic raconte en effet la vie d'Alan Turing, génie des mathématique pendant la Seconde Guerre mondiale, héros qui devient un paria du fait de ses orientations sexuelles, ce qui le conduit au suicide au début des années 50. Il lui faudra attendre cinquante ans pour être reconnu par la reine Elizabeth II.
"Mon histoire n'a rien d'exceptionnel, elle est simplement plus connue", a confié le jeune homme en août dernier, toujours dans The Advocate. Chaque jour, je reçois des questions de plein de jeunes homosexuels habitant au Moyen-Orient. J'ai de la chance. J'ai autour de moi une grande famille qui m'aime de manière inconditionnelle." Il est devenu le porte-parole aux États-Unis de la Gay & Lesbian Alliance Against Defamation (GLAAD), une association américaine de veille médiatique oeuvrant pour dénoncer les discriminations et les attaques faites à l'encontre des personnes LGBT dans les médias. L'association organise d'ailleurs régulièrement des soirées auxquelles prennent part des stars hollywoodiennes. Mais sous les strass et les paillettes, Omar Sharif Jr. ne peut s'empêcher de penser à ses compatriotes, lui qui a quitté l'Égypte en 2011, juste avant la révolution et la montée en puissance de groupes islamistes. Il assure notamment que "la crainte empêche d'autres individus de révéler leur homosexualité", affirmant que ces Égyptiens "ont peur de ne pas être acceptés par leurs familles ou d'être rejetés par la société". L'été dernier, il s'avouait déçu des effets du printemps révolutionnaire, arguant que sa "vision d'une Égypte plus libre et plus égalitaire – pour laquelle bien des jeunes patriotes ont donné leur vie – a été prise en otage".
Assumant ses responsabilités, le petit-fils d'Omar Sharif dit "être la seule figure publique dans le monde arabe à revendiquer [son] homosexualité". Détenteur d'une maîtrise en sciences politiques de la London School of Economics, le petit-fils de l'acteur vu dans Lawrence d'Arabie et Docteur Jivago parle plusieurs langues, notamment l'anglais, le français, le yiddish, l'hébreu et l'espagnol. Il est le fils de l'enfant unique d'Omar Sharif, Tarek, qui avait notamment joué avec son père dans Docteur Jivago.