Alors que Thomas Voeckler avait enflammé le Tour de France l'an passé, on se désespérait de voir un Français triompher lors d'une étape de cette 100e Grande Boucle. Avec un Christopher Froome maillot jaune écrasant la concurrence, au point d'attiser les suspicions de dopage suite à ses performances hallucinantes, proches, voir meilleures, de celles du déchu Lance Armstrong, ce Tour était loin de susciter l'enthousiasme des foules. Mais ça, c'était avant que Christophe Riblon ne surgisse de sa boîte et s'impose au sommet de l'Alpe d'Huez...
Cette 18e étape, la plus mythique du Tour de France avec ses 21 virages de légende, était marquée d'une croix blanche par tous les participants. Pour son centenaire, la prestigieuse course proposait aux forçats de la petite reine une double montée entrecoupée de la terrible descente de Sarenne. Dans un paysage d'une beauté qui fait la légende du Tour, au milieu d'une foule dense et massée sur les pentes de l'Alpe d'Huez, Christophe Riblon s'est imposé, faisant chavirer de bonheur son équipe AG2R La Mondiale et les spectateurs.
Parti très tôt dès le 14e kilomètre en compagnie de neuf autres coureurs, le Tricolore de l'équipe AG2R La Mondiale résista à toutes les attaques pour se retrouver au pied de la mythique ascension avec Moser et Van Garderen. Dans la descente qui suivait, Christophe Riblon tirait tout droit dans un virage mais évitait le pire en se récupérant on ne sait comment. Lorsque se profilait la seconde montée, l'Américain Van Garderen portait une estocade a priori fatale à ses deux compagnons d'échappée... Mais Christophe Riblon ne paniquait pas et faisait une montée à son rythme à travers la foule des 800 000 personnes qui avaient pris place sur les pentes, prenant possession de chaque virage, masquant la route, le ciel et engloutissant les cyclistes qui se présentaient.
Et alors que l'on voyait mal Christophe Riblon revenir sur Tejay Van Garderen, ce dernier commença à pêcher et à puiser dans ses réserves, laissant le vainqueur du jour revenir comme une bombe et lui passer devant à deux kilomètres de l'arrivée. La suite ? "Trois kilomètres magiques, confiait le héros du jour. Le dernier kilomètre n'était pas assez long, avec tout ce public, cette ferveur, j'aurais aimé que ça dure dix kilomètres puisque j'étais sûr que j'allais gagner."
Une victoire que savoure l'équipe après l'énorme désillusion de la veille, qui avait vu son leader Jean-Christophe Péraud, neuvième du général, abandonner suite à deux chutes. Depuis son canapé, le malheureux appréciait à sa juste valeur la victoire du coureur de 31 ans : "Les soucis d'hier sont oubliés. Il m'a mis la chair de poule, j'en avais les larmes aux yeux. Il a fait quelque chose d'énorme, monumental. Il a été très, très fort dans sa tête parce que ce n'était pas évident quand Tejay était devant de se battre et revenir comme ça."
Malgré la déception, l'équipe s'était promis de réagir et de remonter la pente, formule de circonstance. "On avait dit au briefing qu'il fallait conjurer le mauvais sort. Max (Bouet, ndlr), s'est cassé le poignet en début de Tour et hier on a perdu JC. On a dit : 'Il faut se battre les mecs, tenter la victoire d'étape, relever la tête, sortir la tête haute de ce tour", racontait Christophe Riblon, qui compte une seconde victoire d'étape sur la Grande Boucle après celle d'Ax 3 Domaines en 2010. Ce fut chose faite après un peu moins de 5h de course, les larmes aux yeux et les bras levés vers le ciel après avoir franchi la ligne d'arrivée.
Une victoire qui restera dans l'histoire du Tour, au bout de l'effort et au sommet de la plus mythique des ascensions...