Si le millésime 2012 du Tour de France n'est pas un grand cru, il arrive parfois de tomber sur un petit moment d'extase...
Car le maillot jaune Bradley Wiggins n'a jamais été inquiété, se contentant de défendre sa première place acquise lors de la septième étape. Depuis, personne n'a pu ou n'a voulu attaquer sa position de leader. Alors autant le dire, la Grande Boucle est plutôt pénible à suivre. Sauf lorsque les petits hommes verts décident de mettre un peu d'animation et de s'adjuger les étapes les plus difficiles dans les Alpes et les Pyrénées. Eux, ce sont les coureurs d'Europcar, Thomas Voeckler et Pierre Rolland en tête. Ce dernier a décroché la semaine dernière l'une des victoires les plus prestigieuses du Tour, au lendemain de celle acquise par le chouchou des Français Thomas Voeckler.
Et Voeckler a récidivé mercredi 18 juillet, en s'adjugeant l'étape pyrénéenne tant redoutée qui se disputait entre Pau et Bagnères-de-Luchon. Sous un soleil de plomb, et devant l'apathie des leaders, une échappée de 38 coureurs se formait rapidement. A chacune des difficultés de la journée, le groupe s'étiolait, mais Thomas Voeckler restait dans le bon groupe, faisant preuve d'une aisance impressionnante pour gravir les cols du jour. Car cette 16e étape présentait quelques-unes des ascensions les plus mythiques du Tour de France : les cols d'Aubisques et du Tourmalet classés Hors Catégorie, les cols d'Aspin et de Peyresourde, catégorie 1.
"J'ai l'impression de me trouver dans une autre dimension, déclarait Thomas Voeckler à l'Équipe, quelques heures après avoir franchi la ligne en vainqueur et en solo, son dernier compagnon d'échappée Brice Feillu ayant rendu les armes en larmes dans les dernières difficultés. Je suis épuisé, mais euphorique." Le coureur récidive doublement, puisqu'il s'impose pour la seconde fois dans ce Tour 2012, et pour la seconde fois à Bagnères-de-Luchon, après sa victoire en 2010.
Au milieu d'une foule massive rassemblée le long des routes escarpées de montagne, maillot ouvert et sous un soleil de plomb, Thomas Voeckler a écoeuré tous ses concurrents un par un avec une facilité déconcertante, lui qui n'aurait jamais dû prendre le départ du Tour suite à une blessure au genou. C'est dire si l'exploit à est à la hauteur de sa joie : "J'ai encore du mal à réaliser l'ampleur de cette victoire. Passer l'Aubisque, le Tourmalet, l'Aspin et Peyresourde en tête, c'est incomparable pour un coureur. C'est le genre d'étape que je rêvais de gagner lorsque je regardais le Tour à la télévision."
Vainqueur d'étape, mais également maillot à pois du meilleur grimpeur. En franchissant les quatre cols en tête, une performance qui n'était plus arrivée depuis 1947 et un certain Jean Robic, Thomas Voeckler a récupéré la tête du classement du meilleur grimpeur qu'il avait occupé au soir de sa précédente victoire. "Sincèrement, plus que tout, je pensais exclusivement au maillot de meilleur grimpeur", admettait-il, avec en perspective la possibilité de monter sur un podium sur les Champs-Élysées. Et une fois de plus, comme hier, saluer longuement la foule, et sourire après les grimaces liées aux efforts terribles consentis dans la montagne. Thomas Voeckler a encore fait parler son coeur et son courage pour s'imposer au terme d'une étape maîtrisée de bout en bout. Pour son plaisir, et celui du public.