Yannick Noah et sa victoire à Roland-Garros : ''Le plus beau moment de ma vie''

Il y a presque trente ans, le 5 juin 1983, Yannick Noah réalisait l'exploit que toute la France attendait en remportant le prestigieux tournoi de Roland-Garros face au Suédois Mats Wilander. A l'occasion de cet anniversaire, et du coup d'envoi de l'édition 2013, celui qui s'est désormais brillamment reconverti dans la chanson revient sur cette performance encore jamais rééditée par un Français dans une longue interview accordée au Monde.fr.

Souvenir à jamais gravé dans sa mémoire, Yannick Noah confie pourtant ne "pas avoir vraiment envie de faire la fête" pour les 30 ans de son exploit. La raison ? Pour ne pas gâcher un si beau souvenir. "Me faire siffler, ne serait-ce que par une personne, ça me bousillerait. Il s'est passé tellement de choses depuis, ce n'est plus le joueur de tennis que les gens voient. Cette victoire, c'est le plus beau moment de ma vie. Et ce que j'ai de plus cher, c'est mon souvenir. C'est trop précieux pour moi", explique l'ex-tennisman, qui vient de voir le concert hommage à sa maman, décédée en octobre dernier, annulé faute de réservations suffisantes.

Une performance qui trente ans plus tard reste ancrée dans l'esprit de millions de Français qui se rappellent particulièrement de cette émouvante séquence lorsque le père de Yannick Noah, Zacharie, est venu sur le court fêter le sacre dans les bras de son fils. "Il y a quelques jours, j'étais assis sur un banc à Paris avec mon père, et quelqu'un vient nous parler de la finale. (...) C'est marrant, on ne me parle pas du match, on me dit toujours : "Ah, quand votre père est venu sur le court..." Quelles sont les occasions où l'on pleure de joie dans les bras de son père ? Moi, j'ai la chance d'avoir vécu ça une fois dans ma vie, et il se trouve que c'était à la télé et que des millions de gens l'ont vu", se réjouit le chanteur.

Pourtant, Yannick Noah aurait bien pu ne jamais réalisé cet exploit. Quelques mois plus tôt, la star avait sérieusement envisagé d'arrêter le tennis, la faute à son départ prématuré de la Coupe des nations à Düsseldorf, qui provoque la colère des instances dirigeantes. "Là, je me retrouve avec le système qui me pourrit parce que je ne suis pas professionnel, que je ne respecte pas le jeu, bla bla bla. (...) Le dimanche soir, j'appelle mon meilleur pote, Moulinot, qui jouait de la batterie. Je lui dis qu'avec mes économies, on peut s'acheter une petite baraque au Cameroun, je me mets à la guitare, on monte un groupe et j'arrête le tennis ; de toute façon, ça me fait chier, c'est un monde d'enculés. C'est une des seules fois où 'Moul' m'a donné un conseil judicieux. Il me dit : 'Arrête tes conneries, joue Roland', on verra après", raconte-t-il.

Heureusement, Yannick Noah a attendu un peu de temps avant de se lancer dans la chanson et a pu réaliser un exploit jamais imité depuis, et qui n'est prêt de l'être selon lui. "Pas maintenant. Pas cette génération. Ce n'est pas du tout que je pense qu'ils sont mauvais, je pense juste que les mecs devant sont plus forts. Jo-Wilfried Tsonga peut battre un joueur du Top 5 sur une rencontre, s'il sort un gros match, mais il ne peut pas en enchaîner deux." En tout cas, si un Français y parvient, Yannick Noah l'assure : "Ça ne changera rien. Mon souvenir est dans mon coeur. Intouchable."

Durant l'interview, Yannick Noah en a également profité pour répondre à une question sur l'actualité politique. Fervent soutien de François Hollande lors des dernières présidentielles, le chanteur a assuré ne pas faire partie des "déçus" après cette première année de mandat, marquée par des records d'impopularité et l'affaire Cahuzac. "Déçu de quoi ? Je ne m'attendais pas à ce que, du jour au lendemain, tout le monde ait du boulot et se mette à danser Saga Africa. (...) Sincèrement, je ne pense pas que la situation du pays soit la faute de Hollande. Personne ne pourrait faire mieux à sa place. Il arrive, le match est pourri, les balles sont pourries, le court est pourri, les arbitres sont corrompus, et le public a envie qu'il paume", analyse le chanteur.