C'est un fait avéré : le monde des éleveurs de champions contient sa part de désaxés, de forcenés du succès. A Melbourne, première levée du Grand Chelem où elle n'a jamais pu faire mieux qu'un troisième tour en 2008, Aravane Rezaï a de nouveau explosé, il y a quelques jours : balayée dès le premier tour après notamment un premier set catastrophique (que certaines circonnstances expliquent...) par Barbora Zahlavova Strycova (victorieuse 6-0, 3-6, 7-5), la numéro deux du tennis français, qui entame la nouvelle saison en ayant glissé hors du top 20 mondial (elle était tête de série n°17 pour l'Open d'Australie), laissait échapper des éléments inquiétants après cette véritable claque...
"J'ai connu quelques soucis ce matin, mais je ne veux pas en parler et me chercher des excuses", déclarait ainsi de façon sybilline la Franco-Iranienne de 23 ans, née à Saint-Etienne et qui porte depuis 2005 les couleurs de la France, à l'issue de la rencontre. Et sa compatriote Virginie Razzano d'alimenter les craintes, en annonçant le forfait de Rezaï pour leur double, ainsi que ses incertitudes pour la Fed Cup. La nature de ces soucis est désormais connue : son père, ce tyran... Habitué des dérapages comportementaux et des accès de violences, Arsalan Rezaï a récidivé dans les heures précédant le match de sa fille sur le dur australien : RMC Info révélait il y a quelques heures que le père aurait pris à parti sa fille et son compagnon - membre d'une instance du tennis international - alors que le couple se promenait, la reniant elle et le menaçant physiquement lui.
Une enquête ouverte, Arsalan Rezaï suspendu
La WTA n'a pas tardé à réagir, publiant un communiqué signalant non nommément la suspension d'Arsalan Rezaï et l'ouverture d'une enquête : "La santé et le bien-être de nos joueuses sont la priorité n°1 de la WTA. Un sérieux incident nous a été rapporté, qui nous a amenés à suspendre pour une période d'une durée indéterminée un membre de la famille d'Aravane Rezaï. Une enquête a été diligentée."
Une mesure radicale qui prend vraisemblablement acte du "casier" chargé de l'intéressé : le père "abusif", qui jeta son dévolu sur Aravane pour en faire coûte que coûte une championne à défaut d'avoir réussi avec son grand frère Anouch (aujourd'hui sparring-partner de sa cadette, faute d'avoir atteint un niveau suffisant pour faire carrière), écopa notamment de diverses sanctions - une amende de 500 euros infligée par le tribunal correctionnel de Saint-Etienne en 2006 pour avoir menacé le père d'une future adversaire de sa fille en 2004, une exclusion de la Ligue du Lyonnais, mais aussi et surtout une interdiction de stade de deux ans suite à la sinistre affaire Goven (Rezaï père avait qualifié de "violeur de petites filles" l'entraîneur de l'équipe de France de Fed Cup Georges Goven).
Caractériel, despotique avec sa fille comme avec son épouse, "extrêmement soumise" selon le témoignage d'un ex-officiel de la Ligue du Lyonnais, intransigeant, en particulier avec les entraîneurs et les figures masculines entourant sa fille, Arsalan Rezaï a sans aucun doute créé, avec un acharnement pathologique, sa championne de fille, mais il va tout aussi certainement précipiter la fin prématurée de sa carrière, à ce rythme-là...
A moins que la jeune joueuse ne trouve la force et les moyens de s'émanciper... En mai dernier, après avoir décroché le deuxième titre de sa carrière et ébloui le circuit en battant à Madrid, dans une finale de prestige, la championne Venus Williams, Aravane lâchait : "Mon père m'a appris à jouer à l'âge de sept ans, je lui dois ma frappe de balle. [...] Maintenant, j'ai des plans tactiques que mon père n'aurait pas pu m'apporter. Patrick [Mouratoglou, qui fut son premier "vrai" et éphémère entraîneur, NDLR] est plus professionnel dans ce domaine." Un bon début... Un encadrement professionnel et stable serait peut-être garant du déclic attendu pour la joueuse, qui, tout en ayant intégré l'an dernier le Top 20 mondial, n'a jamais fait mieux qu'un quatrième tour dans les grands rendez-vous...
"Des informations exagérées et inexactes (...) Les mésententes familiales ne sont pas choses rares" (Aravane Rezaï)
Pourtant, l'affaire faisant boule de neige, Aravane Rezaï a rapidement donné des nouvelles, en annonçant ses forfaits pour le 1er tour de Fed Cup contre la Russie, les 5 et 6 février à Moscou, ainsi que pour l'Open GDF Suez qui suivra (7-13 février). Une grosse déconvenue pour l'équipe française. Mais aussi - et surtout -, elle a souhaité réagir pour calmer le jeu et démentir de manière évasives des "informations exagérées sur ses proches", selon une information et un communiqué de la joueuse publiés il y a quelques minutes par le site du quotidien L'Equipe :
"Ces derniers jours, des informations exagérées et inexactes ont été relayées par certains médias à propos de moi et de ma famille. En conséquence, je souhaiterais apporter les clarifications suivantes : je suis déçue par mes récents résultats. En conséquence, je souhaite m'impliquer davantage dans ma carrière sportive et je vais travailler avec les membres de mon équipe pour mettre en place la structure qui me convient le mieux. En ce qui concerne les déclarations faites à propos de membres de ma famille, la plupart sont inexactes et sans fondement.
Les mésententes familiales ne sont pas choses rares et ma famille reste très importante pour moi. Je vais faire à nouveau le point sur mon programme de tournois dans les semaines à venir mais, d'un commun accord avec mon équipe, j'ai pris la décision de ne pas participer à la prochaine rencontre de Fed Cup ainsi qu'à l'Open GDF SUEZ. Je poursuis mon programme d'entraînement et espère un retour à la compétition dans un futur proche. En attendant, je demande aux médias de bien vouloir respecter ma vie privée ainsi que celle de ma famille", explique la numéro 2 française."
La seule chose claire, c'est que la situation est bien compliquée...