Ce jeudi 19 octobre 2023 n'était pas une date comme les autres pour Isabelle Adjani. L'actrice aux cinq César avait rendez-vous avec la justice. Elle était attendue au tribunal correctionnel de Paris pour être jugée. Elle est accusée de fraude fiscale et blanchiment, d'avoir dissimulé une donation en prêt en 2013 et de s'être fictivement domiciliée au Portugal en 2016 et 2017, ce qu'elle conteste vigoureusement.
Alors qu'elle se trouvait depuis plusieurs jours aux Etats-Unis pour assurer des représentations du Vertige Marilyn (Marilyn's Vertigo en anglais), Isabelle Adjani a fait savoir hier par le biais de ses avocats qu'elle ne pouvait pas se rendre à Paris en raison d'un problème de santé et avait demandé le report du procès. L'artiste n'ayant "pas pu prendre l'avion" depuis les Etats-Unis à cause d'une "maladie aiguë qui a été certifiée par un médecin new-yorkais", avaient indiqué à l'AFP ses conseils, Stéphane Babonneau et Olivier Pardo. Mais aujourd'hui, le tribunal correctionnel de Paris a rejeté cette demande. Il a en effet décidé de juger l'affaire en son absence. En début d'audience, la défense d'Isabelle Adjani a demandé un report du procès, faisant valoir que l'actrice, actuellement aux États-Unis, souffre "d'une pathologie aiguë incompatible avec l'avion".
Il n'était pas suffisamment établi que Mme Adjani avait réellement l'intention d'être présente
"Ce n'est pas un refus de complaisance, a plaidé Me Olivier Pardo, s'appuyant sur un certificat médical. Elle tient à s'expliquer, elle tient à être là". Les avocats ont aussi motivé leur demande du fait de l'impossibilité, pour Mamadou Diagna NDiaye, de venir témoigner. "C'est un témoin essentiel, car c'est le prêteur du prêt discuté", ont-ils affirmé. Le parquet national financier (PNF) s'est opposé à cette requête, jugeant le certificat médical "pas circonstancié". "J'estime aujourd'hui qu'il y a des raisons de penser qu'elle ne s'est pas mise en mesure volontairement de venir", a déclaré le procureur, qui a ajouté que le témoignage de M. Ndiaye avait déjà "été recueilli pendant l'enquête". Après une demi-heure de délibération, le tribunal a rejeté cette demande, considérant "qu'il n'était pas suffisamment établi que Mme Adjani avait réellement l'intention d'être présente". La présidente a rappelé que la citation devant le tribunal datait de juin et que la défense avait fourni une réservation d'avion retour prise le 16 octobre pour "un vol qui arrivait ce matin à 11H00", soit seulement 02H30 avant le procès.
Connue en particulier pour ses rôles dans L'été meurtrier (1983), Camille Claudel (1988), La Reine Margot (1994) ou plus récemment Mascarade (2022), l'actrice et chanteuse est soupçonnée d'avoir fait passer une donation de 2 millions d'euros pour un prêt, ce qui lui aurait permis d'éluder 1,2 million d'euros de droits de mutation. Cette somme lui a été transférée par Mamadou Diagna NDiaye, un influent homme d'affaires sénégalais, président du Comité national olympique et sportif sénégalais et membre du Comité international olympique. L'actrice fait valoir qu'il est un ami, parrain de son fils, et que le prêt a été dûment enregistré auprès du fisc. Il lui est en outre reproché de s'être fictivement domiciliée au Portugal, éludant ainsi 236000 euros d'impôt sur le revenu, et d'avoir fait transiter par un "compte bancaire américain non déclaré" la somme de 119 000 euros. Sur ces deux points, elle conteste aussi toute infraction.
La semaine dernière, lors d'une longue interview accordée à Paris Match, Isabelle Adjani avait affronté les accusations dont elle fait l'objet. "Oui, je vis dans un petit immeuble qui ne paye pas de mine. Désolée, je ne suis pas propriétaire d'un manoir avec un spa, mais locataire d'un appartement avec un grand parking que j'ai aménagé en loft et toute ma vie est entreposée", avait expliqué l'actrice, évoquant son logement à Carcavelos, une petite ville à une vingtaine de kilomètres de Lisbonne.
Isabelle Adjani reste présumée innocente des faits qui lui sont reprochés jusqu'au jugement de l'affaire.