Sa voix très reconnaissable, timbrée et riche, emblématique d'une époque où l'on savait raconter des histoires, a accompagné des milliers d'enfants captivés par les découvertes d'Esteban dans le dessin animé culte Les Mystérieuses Cités d'Or, et les pérégrinations non moins palpitantes de Rémi sans famille. Elle s'est tue samedi 29 décembre 2012. Jean Topart, dont la prolifique carrière ne se limite pas à son édifiante voxographie, est mort à l'âge de 90 ans à Port-Marly, dans les Yvelines, a fait savoir dimanche sa famille à l'AFP.
Né le 13 avril 1922, venu au théâtre à la fin des années 1940, dans le sillage de sa soeur Lise Topart, comédienne qui décédera tragiquement en 1952 dans un accident d'avion, Jean Topart intègre en 1955 la troupe du TNP de Jean Vilar, rejoignant les Gérard Philipe, Georges Wilson, Michel Bouquet et autres Philippe Noiret, et héritant de nombreux premiers rôles, qui lui vaudront plus d'un triomphe, notamment à Avignon, dans des oeuvres classiques telles que Macbeth, par exemple.
S'il a rapidement eu sa chance au cinéma, se voyant confier par Jean Renoir le rôle de Désiré dans Le Testament du docteur Cordelier (1959), et faisant déjà entendre sa voix si accrocheuse en tant que narrateur dans la version de 1958 de Les Misérables par Jean-Paul Le Chanois (avec Jean Gabin, Bernard Blier, Bourvil...), c'est vers la télévision qu'il se tournera largement après son départ du TNP dans les années 1960, tout en continuant son aventure sur les planches.
Cette décennie-là, outre les retransmissions Au théâtre ce soir, on le verra au petit écran notamment dans des réalisations de Jean-Pierre Decourt, dont le fameux feuilleton Rocambole (1964-1965) avec Pierre Vernier dans le rôle-titre, avant de le remarquer à la fin des années 1970 dans Zola ou la conscience humaine, de Stellio Lorenzi (1978), téléfilm en quatre épisodes dans lequel il campe avec sensibilité le grand écrivain. Au cinéma, qu'il ne négligera pas pour autant, il se signalera entre autres dans Angélique, Marquise des Anges de Bernard Borderie (1964), Le Soleil des voyous de Jean Delannoy (1967), Maldonne de Sergio Gobbi (1969), Poulet au vinaigre de Claude Chabrol (1985), ou encore Les Acteurs de Bernard Blier (2000), son dernier film, pour lequel il incarne un personnage inspiré du cinéaste Jean-Pierre Melville. Et laissera au passage une voxographie conséquente, avec nombre de doublages notables, dont Bytes dans Elephant Man (1980) de David Lynch, le docteur dans Birdy d'Alan Parker (1984), Salieri dans Amadeus de Milos Forman (1984), ou encore le personnage de Christopher Lee dans Sleepy Hollow de Tim Burton (1999).
Une voix à la fois marquante et caméléon qui se fera entendre dans des registres éclectiques (du documentaire à la pub, jusqu'aux jingles des émissions de Cauet sur Europe 2 et Fun Radio), et reste forcément gravée dans les mémoires de la génération 1970-1980 marquée par les animés japonais. Pour Ulysse 31 de Jean Chalopin (scénariste) et Bernard Deyriès (réalisateur), il donne la voix tonnante de Zeus. Pour Les Mystérieuses Cités d'Or, du même tandem, il narre et commente les séquences documentaires ponctuant les épisodes. L'un de ses derniers doublages en la matière fut, en 2000, le classique d'animation Disney La Planète au trésor.
Père et grand-père, Jean Topart laisse un grand silence. Nos pensées vont à ses proches.