"Une branlée". Comme son protégé quelques minutes auparavant, Eric Winogradsky, l'entraîneur de Jo-Wilfried Tsonga, rend les armes lorsqu'il s'agit de commenter l'affrontement, ou plutôt l'absence d'affrontement, entre le Manceau et... Monsieur Federer.
1h28' : telle est la durée, exceptionnellement courte à ce niveau, de la démonstration en trois sets et un seul acte du Suisse face au champion français. 6-2, 6-3, 6-2, 33 points gagnants pour seulement 13 fautes directes, aucune balle de break offerte à son adversaire : Roger Federer, largement en tête du classement ATP, domine outrageusement les débats mondiaux et va continuer à accentuer son avance (déjà plus de 1000 points) sur son dauphin Nadal, forfait pour un mois en raison d'une lésion au genou droit qui l'a contraint à l'abandon dans son quart de finale face à Andy Murray - l'Ecossais défiera Roger Federer, qui visera un quatrième titre dans cette première levée du Grand Chelem, en finale.
Galvanisés par son exploit en cinq sets face au n°3 mondial Novak Djokovic (et une cinquième manche à sens unique) en quart, Tsonga et son public voulaient croire à l'exploit sur les courts qui avaient connu la première grande sensation Tsonga, en 2008. "Je ne me sentais pas trop mal, mais il me manquait le coup de rein pour venir terminer les points ou tenir les appuis quand j'étais pris à contre-pieds. Je manquais un peu de tonicité. J'aurais tenu sur la durée, mais j'avais du mal dans l'intensité", analysait-il après le match, comme si un coup avait été possible. En réalité, il n'en est rien : malgré une belle agressivité en début de rencontre, le Suisse a relevé le défi dès le début et pratiqué un tennis divin, tactique et riche de variété - son Art inimitable. Le score est suffisamment éloquent.
"A un moment, je me suis dit que j'allais fracasser la raquette contre le banc au changement de côté (sourires). Puis je me suis dit que j'allais plutôt la donner à quelqu'un dans le public. Finalement, je me suis dit : merde, je la laisse là et je joue avec. (Il souffle) Il y a des moments où c'est frustrant car tu ne mets pas la balle où tu as envie, tu commets une faute bête ou ton adversaire te fait un point gagnant. C'est énervant. Il y a des moments de frustration, mais c'est le tennis. C'est beau", philosophait-il finalement, comme le rapporte L'Equipe.
"Il n'est pas numéro 1 mondial pour rien et je ne suis pas numéro 10 pour rien", s'incline l'attachant Tsonga. Une marque de révérence qui ne fait que magnifier son attitude pleine de panache, laquelle ne tardera plus à le porter, sans doute, vers un premier titre en Grand Chelem.