Le réalisateur portugais Manoel de Oliveira est mort ce 2 avril 2015 à 106 ans, selon l'AFP, qui cite le producteur Luis Urbano. Il semblait être éternel, lui qui avait découvert le cinéma parlant et, infatigable passionné, était devenu le premier cinéaste centenaire en activité de toute l'histoire du cinéma.
Manoel Cândido Pinto de Oliveira, de son vrai nom, né le 11 décembre 1908 dans une famille de la bourgeoisie industrielle de Porto, s'est intéressé au cinéma dès son plus jeune âge grâce à son père qui appréciait cet art et l'emmenait souvent voir les films de Charlie Chaplin et Max Linder. Il a étudié au Colégio Universal de Porto, puis dans un collège jésuite en Galice.
Il jouera dans le premier film parlant portugais, en 1933, A Canção de Lisboa, mais travaillera aussi les techniques de réalisation grâce à sa première caméra, offerte par son père en 1929, avec laquelle il commencera à tourner son premier film Douro, faina fluvial, un court métrage documentaire muet qui met en relation le fleuve Douro et la vie des marins. Cette oeuvre sortira en 1931.
Avec son premier long métrage Aniki Bobo en 1942, sur le quotidien de quelques enfants des quartiers populaires de Porto, Manoel de Oliveira commence à se faire connaître. Il s'en va en Allemagne pour vivre de nouvelles aventures et fuir la dictature salazariste. Il reviendra dans son pays pour tourner Le Peintre et la Ville en 1956. Conjuguant caméra subjective et "cinéma direct", représentation de la ville et reflets des tableaux d'Antonio Cruz, ce film instaure la naissance d'un nouveau courant dans le documentaire.
Sa filmographie très prolixe montre son goût pour les films d'amour impossible : Amour de perdition en 1978, Francisca ou encore Le Soulier de satin en témoignent. En 1995, il aura le plaisir de diriger Catherine Deneuve et John Malkovich dans Le Couvent. Plus tard, la fille de cette actrice, Chiara Mastroianni, jouera dans son film La Lettre.
En 2010, Manoel de Olivera est à Cannes pour la présentation de L'Étrange Affaire Angélica, qui concourt dans la catégorie Un certain regard à Cannes en 2010. Deux ans avant, il avait été sacré par le Festival l'année de ses 100 ans, avec une Palme d'honneur remise par son ami Michel Piccoli : "J'apprécie énormément de la recevoir de cette façon-là parce que je n'aime pas trop la compétition, c'est-à-dire gagner contre mes collègues ; c'est une belle façon de recevoir un prix", avait-il alors déclaré.
Il a reçu le prix Robert-Bresson en 2004 et les insignes de grand officier de la Légion d'honneur à Porto en 2014, juste avant ses 106 ans. En 2012, il avait été hospitalisé durant une semaine en raison d'un problème pulmonaire, mais avait réussi à s'en remettre pour continuer à vivre de sa passion.