Quelques heures après la disparition de l'inestimable Michel Legrand, un autre compositeur qui "ne vivait que pour la musique" s'est éteint : Jean Guillou, compositeur et organiste qui fut titulaire pendant plus d'un demi-siècle du grand orgue de l'église parisienne de Saint-Eustache, est mort samedi 26 janvier 2019 à Paris à l'âge de 88 ans, a annoncé dimanche à l'AFP son épouse.
"Il était très vif jusqu'au bout, très lucide. Il ne vivait que pour la musique. Il s'inquiétait pour ses concerts qui étaient programmés jusqu'en 2020", a confié Suzanne Guillou, son épouse depuis 39 ans, alors que le musicien mondialement réputé devait prochainement se produire en Italie et à Marseille, après avoir notamment joué le 21 septembre dernier en la cathédrale de Léon en Espagne. Reflet d'une carrière et d'une reconnaissance résolument internationales.
Formé au Conservatoire de Paris (orgue avec Marcel Dupré, harmonie avec Maurice Duruflé, analyse avec Olivier Messiaen), Jean Guillou était ensuite parti enseigner à Lisbonne puis à Berlin, où il créa ses premières oeuvres, ou encore à Zurich, où il forma plus de 300 élèves entre 1970 et 2005. Titulaire, de 1963 à 2015, de la tribune de l'église Saint-Eustache, l'une des plus prestigieuses de France, "il avait décidé d'en claquer la porte, s'estimant peu respecté", relate encore l'AFP à propos du musicien, qui s'était également fait concepteur d'instruments. "C'était un immense artiste, un homme flamboyant, pas assez reconnu en France", abonde Jean-Marie Brohm, ancien président de l'association Augure qui assure la promotion de l'oeuvre de Jean Guillou.
Autre gage de ce tempérament passionné et irréductible : Jean Guillou avait décliné en 2010 la Légion d'honneur, au motif qu'il ne pouvait l'accepter "à l'heure où la musique dite savante ou classique (voyait) sa place diminuée par toutes les instances officielles". Dans sa spécialité, il militait d'ailleurs pour faire "sortir l'orgue des églises et lui donner une autre vie". A charge à ses nombreux disciples d'honorer son voeu de modernité et de poursuivre son oeuvre.