En 1985, Philippe de Dieuleveult est mort au Zaïre, actuelle République démocratique du Congo, alors qu'il était en expédition avec d'autres personnes sur les lacs d'Inga. Six de ses coéquipiers sont décédés avec lui, dont Richard Jeannelle, photographe de Paris Match. Dans le cadre de l'Africa Raft, ils avaient pour projet de traverser l'Afrique d'est en ouest en bateau pneumatique, ce qui représentait un parcours de 5 000 kilomètres. Un défi presque impossible et jamais relevé auparavant, tant les courants sont dangereux et où le débit peut atteindre 80 000 mètres cubes par seconde, comme nous l'apprend le nouveau numéro de Paris Match paru ce jeudi 9 février.
Deux membres de l'équipe ont d'ailleurs renoncé à la dernière minute : Jean-Louis Amblard et le docteur François Laurenceau. Ils seront les seuls survivants. "J'avais peur, je vous le dis franchement. On avait fait une reconnaissance en avion la veille. J'ai vu qu'au niveau d'Inga, ça bouillonnait beaucoup. J'avais demandé à l'équipe qu'on ne se jette pas comme ça dans ces rapides, mais qu'on aille en reconnaissance en longeant la rivière pour choisir la meilleure voie de navigation", rapporte aujourd'hui François Laurenceau à nos confrères. Mais "la seule voie possible" était de "se jeter dedans ou rien".
Les deux embarcations, spécialement conçues pour l'expédition, se sont alors lancées. Mais malgré leur solidité, elles ont été emportées par les courants. Officiellement, les équipes sont mortes par noyade accidentelle mais les circonstances de leurs disparitions ont toujours posé de nombreuses questions. Beaucoup estiment qu'il s'agissait en réalité d'une bavure de l'armée zaïroise, dont Alexis de Dieuleveult, le neveu de Philippe de Dieuleveult. Ce dernier vient d'ailleurs de demander une réouverture de l'enquête. Il a en effet déposé une plainte auprès du Doyen des juges de Paris le 3 février dernier.
En se replongeant dans l'affaire à cette occasion, Paris Match retient que le premier bateau a certainement bien été victime d'un accident, mais que cela est moins probable pour le deuxième, où se trouvait Philippe de Dieuleveult. Et pour cause, deux jours après le drame, Jean-Louis Amblard et François Laurenceau ont rencontré un zaïrois qui pensait avoir vu "trois hommes blancs débarquer d'un bateau échoué". D'autres témoignages "approximatifs" allaient dans ce sens. L'hypothèse d'une bavure est alors émise. Car, quelques semaines avant l'expédition, les services français alertaient d'une attaque imminente de mercenaires sur le barrage de l'Inga, une zone alors sous la menace d'intrusion de groupes armés. Une autorisation de passage pour l'équipe d'expédition devait justement avoir été transmise aux services de sécurité mais le message a été "oublié sur le coin d'un bureau".
Une connerie, c'est tout
Des années plus tard, en 1994, l'affaire devient plus floue avec la sortie du livre d'un ancien militaire zaïrois qui parle de prises d'otages et d'assassinats. Il y expliquait avoir notamment assisté à celui de Philippe de Dieuleveult. À ce moment-là, Jean, le frère aîné du présentateur dépose une plainte contre X pour meurtres. Un non-lieu a été prononcé en 2004. L'affaire hante néanmoins encore tous ceux qui l'ont suivie de près, dont Gérard d'Aboville qui a enquêté. Selon lui, il ne s'agirait sans doute pas d'une simple noyade mais plutôt d'un dramatique malentendu. "Cela ne se résume peut être qu'à une histoire aussi absurde que tragique, le télex non transmis. Une connerie, c'est tout. Peut-être que les militaires zaïrois ont pensé faire leur boulot en imaginant avoir coincé des mercenaires", a-t-il envisagé pour Paris Match.
Alexis de Dieuleveult, le neveu, réclame quoi qu'il en soit que justice soit faite et qu'un crime contre son oncle soit formellement reconnu. Les trois enfants de Philippe de Dieuleveult ne souhaitent pas de leurs côtés que l'enquête soit réouverte.