Taylor Townsend : La revanche de la pépite du tennis, humiliée pour son poids

Physique hors norme et musculeux aux formes généreuses, joueuse de tennis talentueuse afro-américaine, lourde frappe et déplacement rageur, Taylor Townsend a tout de Serena Williams, l'âge et le palmarès en moins. Pourtant, l'ex-numéro un junior a dû subir les humiliations de sa propre fédération avant de révéler son talent au premier tour de Roland-Garros.

Physique atypique et talent brut

A 18 ans, l'actuelle 205e mondiale qui accuse un léger surpoids (voire un gros surpoids pour certains) a démontré le 28 mai dernier face à la Française Alizé Cornet qu'il faudrait désormais compter avec elle. Bien plus qu'une simple machine à balancer des parpaings à son adversaire, la jeune Taylor Towsend a fait preuve d'un jeu complet, entre agressivité, précision, déplacement rapide et prise de risque. Balayée malgré une belle résistance (6-4, 4-6, 6-4), la tricolore, 21e mondiale, est restée sans réponse face à la puissance de l'Américaine.

Pourtant, rien n'était gagné pour Taylor Townsend. Son physique atypique, - 167 centimètres pour 80 kilos -, lui a fait subir les pires humiliations. Loin des filles qui hantent les tournois, à l'image d'une Maria Sharapova ou d'une Ana Ivanovic, la gauchère sait qu'elle se démarque : "Je ne suis pas bâtie comme toutes ces filles grandes et maigres. Ça, je ne peux rien y faire. Alors les gens peuvent penser ou dire ce qu'ils veulent, aujourd'hui, je m'en moque car moi, je vais sur le court chaque jour et je bouge mon cul !"

Humiliation et tragédie

Et ce n'est pas la fédé américaine, l'USTA, qui l'a aidée... Lors de l'US Open 2012, Taylor Towsend avait été humiliée comme personne par sa propre fédération. Celle-ci avait menacé la numéro un junior de ne plus l'aider à financer ses déplacements, ni de lui fournir de wild-card (des invitations) pour les tournois américains, tant qu'elle ne perdrait pas du poids. Résultat, à Flushing Meadows où se déroule l'US Open, la mère de Taylor Townsend avait dû financer elle-même le tournoi de sa fille. "C'était choquant, confie la joueuse dans les colonnes de L'Equipe. J'étais triste, dévastée. Je pleurais. J'avais travaillé si dur... On ne devient pas numéro 1 mondiale juniors par miracle."

La décision de l'USTA a soulevé une volée de critiques de la part de légendes du circuit féminin, à l'image de Martina Navratilova ou Lindsay Davenport. Même Serena Williams, bien connue pour ses formes elles aussi hors normes, s'était émue du traitement réservé à sa compatriote, évoquant "une tragédie" et soulignant que "dans le tennis plus qu'ailleurs, les athlètes femmes ont des tailles, des silhouettes et des couleurs différentes".

Serena Williams, le modèle

Serena Williams justement, dont Taylor Townsend s'applique à analyser le jeu en engloutissant des heures de vidéo. Tout comme celui de Billie Jean King ou encore Martina Navratilova. Et quid de ce petit carnet qu'elle consulte en plein match, lors des minutes de repos ? La native de Chicago répond, avec humour et une fraîcheur déconcertante : "Mais ce sont mes petits secrets ! Ce sont des notes qui m'aident à simplifier mon jeu. Je les utilise depuis très longtemps pour chaque match et même pour les entraînements."

Aujourd'hui entraînée par Zina Garrison, ancienne championne du monde junior, première Afro-Américaine dans le top 10 mondial et ex-numéro trois mondiale, elle-même victime de boulimie au cours de sa carrière, Taylor Townsend joue épanouie, avec un seul but en tête, "devenir un jour numéro 1 mondiale et avoir ma photo sur les murs". En attendant, il faudra encore travailler, elle qui a perdu au second tour de Roland-Garros ce 30 mai face à Carla Suarez Navarro, tête de série numéro 14 (6-2, 6-2).

Qu'importe. La jeune femme a démontré que, malgré son physique atypique, il faudrait désormais compter avec elle à l'avenir et sur sa volonté de réussir et d'inspirer les autres : "Chacun est construit différemment. Je veux inspirer et encourager les filles qui n'ont pas le corps parfait de Sharapova à croire en elles, et à aimer ce corps qu'elles ne peuvent pas changer. Et je leur dis : 'Hey, vous n'avez pas à ressembler à un cure-dents pour voir votre nom en haut de l'affiche ! ' "