C'est une terrible nouvelle, et une poignante oraison funèbre, que la tenniswoman française Virginie Razzano, 28 ans, livre ce mardi 17 mai 2011 dans le quotidien L'Equipe : son fiancé et ancien coach Stéphane Vidal, dont elle partageait la vie depuis une dizaine d'années, est mort lundi des suites d'une tumeur au cerveau dont il souffrait depuis neuf ans et dont il lui avait volontairement caché l'aggravation ces dernières semaines.
Malgré la douleur et le deuil, Razzano, qui flirte actuellement aux abords de la 100e place mondiale (93e) après une saison 2010 calamiteuse (en raison notamment d'une blessure consécutive à un massage par un kiné de la WTA...), s'alignera aux Internationaux de France de Roland-Garros, qui s'ouvriront dans quelques jours, afin d'honorer une des dernières volontés de son bien-aimé : "Il y a quatre ou cinq jours je lui ai demandé : "est-ce que tu veux que j'aille jouer à Roland-Garros ?", il m'a dit : "oui il faut que tu ailles jouer." Parce que, son intention, c'est que je continue ma vie, que je joue aussi pour lui et que je continue à être forte et à me battre", a expliqué la joueuse au quotidien sportif. Porte d'Auteuil, où elle s'est imposée en junior en 2000, la Dijonnaise résidant à Nîmes n'a jamais fait mieux qu'un quatrième tour. C'était en 2009, une saison où tous les signaux étaient au vert et où Razzano avait atteint le 16e rang mondial, le meilleur classement de sa carrière... On imagine qu'elle jettera toute sa volonté et toutes ses forces dans cette édition 2011.
Et avant de rendre hommage sur le court à Stéphane Vidal, c'est dans les colonnes de L'Equipe que Virginie Razzano offre un témoignage bouleversant sur leur vie partagée et leur amour endolori par la maladie. Un témoignage livré dans les minutes suivant l'annonce par le Dr Montalvan du décès de son compagnon, en plusieurs coups de téléphone. Un témoignage que le quotidien spécialisé a recueilli avec émotion : "En avril, lors du dernier tournoi de Miami, auquel elle participait, tout le tennis français savait que Stéphane, victime d'une tumeur au cerveau depuis neuf ans, arrivait au bout du bout. Tout le tennis français et certaines de ses adversaires savaient, sauf Virginie Razzano, car il avait souhaité la laisser dans l'ignorance pour qu'elle continue à jouer, coûte que coûte", pose en entame le journal.
Voici quelques extraits de l'hommage terriblement émouvant de Virginie Razzano, à laquelle nous adressons nos plus sincères condoléances (ainsi qu'à la famille de Stéphane Vidal) et que nous suivrons avec attention et bienveillance à Roland-Garros, l'intégralité étant à retrouver dans l'édition du jour de L'Equipe :
"Jusqu'au bout je l'ai accompagné dans ses derniers instants (...) Il a été conscient jusqu'à samedi soir, et puis dimanche matin, il s'est mis à dormir beaucoup. De temps en temps, il m'entendait, mais ne pouvait plus me répondre. Moi, je lui parlais. Jusqu'au bout, je lui racontais tous les bons moments qu'il a pu m'apporter. Je lui disais qu'il a été merveilleux avec moi (...) Je l'ai connu il y a plus de onze ans, en allant m'entraîner dans le club de ses parents. Au fil du temps, on est devenus vraiment très amis. Il était comme mon grand frère. On a vécu des moments forts et, petit à petit, on est tombés amoureux. On est sortis ensemble, c'était il y a onze ans. Il a su deux ans après qu'un jour ou l'autre il allait partir (...) Il n'y avait aucun traitement. Il a tenu jusqu'à mon anniversaire, qui était le 12 mai (28 ans) (...) Ce qu'on a fait de plus beau dans notre vie, ce n'est pas un match ou un autre, c'est notre amour. De notre couple, on n'a fait qu'une seule personne.
En mars-avril, j'ai disputé la tournée américaine avec sa maman. Lui était resté à Marguerittes, dans le Gard, avec son papa. On ne m'a pas dit la gravité de son cas à ce moment-là. Parce que Stéphane voulait me la cacher, il voulait que je joue bien à Miami (...) Il savait qu'il allait mourir d'ici peu. Savoir que je jouais, c'était une énergie (...) J'ai failli ne pas pouvoir lui dire au revoir. Pendant Indian Wells, on l'a réanimé, il était en train de partir. On a failli le perdre, mais ils ne me l'ont pas dit, et en fait il a attendu mon retour de Miami. Sa neurologue avait dit à sa famille : "Vous verrez, quand Virginie reviendra, s'il faut, il partira, parce qu'il n'attend plus que ça, il attend son retour pour lui dire au revoir."
Ça a été difficile pour moi de partir à la Fed Cup (11-17 avril) (...) mais j'ai fait la semaine avec les moyens du bord (...) Et surtout, je n'ai rien montré sur le terrain, je savais qu'il me regardait à la télé. Je savais qu'il voulait me voir en bagarreuse.
Je n'ai jamais rencontré quelqu'un d'aussi bon et d'aussi solide que Stéphane. C'est dur, mais avec cette force qu'il m'a donnée, je suis encore vivante."
G.J.