Cela partait de la volonté de gagner quelques centaines d'euros en louant une chambre dans son appartement. En 2014, ne travaillant pas assez, la comédienne Anne Consigny (dernièrement vue dans Elle avec Isabelle Huppert) décide de louer une partie de son appartement sur Airbnb. Une décision qui va bouleverser sa vie car elle va ouvrir sa porte à Susanna et sa fille Narine, deux Arméniennes. Une histoire émouvante et tragique dont elle a décidé de faire un documentaire, elle en parle pour Paris Match.
Susanna est venue en France avec sa fille Narine pour que cette dernière puisse soigner son cancer. Sa famille a réuni l'argent pour le voyage en deux mois, en vendant la maison familiale. "Les gens pense que les étrangers viennent se faire soigner gratuitement en France, mais ce n'est pas le cas. Pendant les trois premiers mois, elle arrivait à sa chimio toutes les semaines et donnait en liquide l'équivalent d'un mois de salaire de son père : 1 500 ou 2 000 euros. Après, elle a pu être remboursée, mais les problèmes de paperasserie ont fait qu'elle a obtenu son numéro de sécurité sociale avec plus d'un mois de retard, soit quinze jours avant sa mort. Sur les images que j'ai filmées, le médecin dit que si ça avait été moi – pas Anne Consigny, mais une Française –, elle aurait été soignée autrement."
Anne Consigny estime que Narine ne serait peut-être pas morte aussi vite si elle avait été française. Elle souligne l'implication du médecin comme l'enfer de la bureaucratie, mais a découvert des "côtés incroyables du système" et aime la France davantage depuis.
En toute discrétion, l'actrice a filmé Narine. Elle la décrit comme une femme d'une grande beauté et songeait, si elle guérissait, à la pousser à apprendre le français et à être devant la caméra. Après sa mort, elle a décidé d'accompagner sa mère, Susanna, en Arménie pour l'enterrement, ne voulant pas la laisser rentrer seule. Avec ce projet de documentaire, Anne Consigny voudrait qu'une partie des bénéfices reviennent à la famille de Narine. On imagine que sa grande amie Julie Gayet, actrice mais aussi productrice, doit réfléchir sur ce projet.
Le fait d'avoir côtoyé la mort a certes ravivé des souvenirs de proches décédés de cancer mais la comédienne n'a pas pour autant peur de la maladie ou de quitter ce monde : "J'ai une amie qui est morte d'un cancer, un amoureux aussi. Toutefois, ça ne m'angoisse pas plus que ça. Il n'y a que la mort de mes enfants [Vladimir, né en 1989, comédien, et Louis, né en 1994, NDLR] qui pourrait me faire peur."
Le père de ses enfants est le réalisateur Benoît Jacquot (Les Adieux à la reine, Trois coeurs) et elle se souvient de leur vie commune : "Quand je vivais avec lui, du temps où je chômais beaucoup, j'ai écrit une pièce, ou plutôt adapté un roman d'Iris Murdoch. C'était complètement raté et je l'ai laissé dans mes tiroirs. Ce n'était pas à cause de Benoît. On avait des vies très séparées, lui faisait des films, moi, je m'occupais des enfants." Elle est aujourd'hui mariée au critique d'art Eric Chassey.
Retrouvez l'intégralité de l'interview dans le magazine Paris Match du 15 septembre.