Il est mort, il est mort le soleil : Bobby Hebb, dont la chanson Sunny est devenu un formidable standard à travers les âges, au travers des multiples reprises dont il a fait l'objet, a rejoint l'obscurité. Le chanteur est décédé mardi des suites d'un cancer du poumon, au Centennial Medical Center de sa ville natale de Nashville, à l'âge de 72 ans.
Né dans une famille où le son était tout, ses parents étant tous deux aveugles et musiciens, Bobby Hebb démontra qu'il avait lui aussi la fibre dès ses 3 ans, se produisait avec son grand frère de 9 ans dans des événements locaux. Sa participation à un show télé lui permit d'intégrer le légendaire événement country hebdomadaire Grand Ole Opry auprès du Roi de la Country Roy Acuff, dont il devint un des musiciens.
1963, une année tragique pour tous les Américains, et pour Bobby en particulier, à plus d'un titre. Outre l'assassinat de John Fitzgerald Kennedy, il vécut celui, traumatisant, de son père Harold, poignardé dans une bagarre à la sortie d'une boîte de Nashville. Broyé moralement, Bobby Hebb se réfugia dans la musique, dans l'écriture de chansons. Mais ce n'est pas immédiatement que Sunny vint percer les nuages et illuminer la chape de plomb tombée sur ses jours.
En 1966, ce soleil musical pointe le bout de son nez hors d'un studio new-yorkais, où il fut enregistré. "Tout ce que je voulais, expliqua l'intéressé, c'était me projeter vers des moments plus heureux - tout simplement espérer des jours meilleurs -, parce que les choses, à l'époque, étaient au plus bas. Après l'avoir écrite, je me suis dit que Sunny pouvait être une approche différente de ce que Johnny Bragg évoquait dans Just Walkin' in the rain".
La chanson commence à gagner ses galons de tube lorsque Bobby Hebb l'interprète lors de la tournée des Beatles en 1966, à laquelle il participe. Parmi les principaux artistes à l'avoir reprise au fil des ans, on pense à Boney M, Frank Sinatra accompagné de Duke Ellington, Georgie Fame, Cher, Stevie Wonder, Dusty Springfield, Ella Fitzgerald, Nick Cave, Jamiroquai, Marvin Gaye, Johnny Rivers, James Brown ou encore... Christophe Willem.
Le succès de Sunny (à redécouvrir ci-dessus en vidéo, par son interprète originel, dans une version live fantastique) fut tel que Bobby Hebb enregistra même une seconde version, disco, en 1976. Hebb signa d'autres beaux succès, avec A Satisfied Mind (1966) ou Love me (1967). Après la parution de l'album Love Games en 1970, Hebb ne publia plus rien jusqu'en... 2005, année où parut That's all I wanna know. En octobre 2008, le chanteur, à 70 ans, se produisait en concert au Japon.
En guise d'épitaphe tendre, on paraphrasera avec délectation Sunny :
"[Bobby], thank you for the sunshine bouquet.
[Bobby], thank you for the love you've brought [our] way."
Et la pluie de tomber en nos coeurs.
G.J.