On reconnaît sa gouaille, son verbe, son franc-parler, son côté polymorphe, on le qualifie d'homme de théâtre de radio ou de cinéma. Édouard Baer, c'est un nom connu du grand public. Dans le magazine Society, l'acteur de 51 ans s'offre plusieurs pages d'interviews où il saute d'un sujet à l'autre. Il évoque notamment son rapport au public et l'absence d'un grand film dans sa carrière (seulement des seconds rôles mémorables comme dans Mission Cléopâtre). "Je suis consterné, oui, reconnaît-il. Les vraies belles carrières, ce sont celles de gens qui inspirent les metteurs en scène. (...) En ce qui me concerne, je les ai peut-être déçus en jouant mal, je ne sais pas... Mais ce que je sais, c'est que je n'ai pas connu d'âge d'or dans ma carrière."
Il poursuit, plus rassurant sur ce bilan : "J'ai eu des petits trucs à la mode, à des moments. Après, créer une énergie, une bizarrerie, une musique, c'est aussi utile à la société de faire une oeuvre." Et d'ajouter, non sans sarcasme : "On rêve de faire des grands films, mais pour quoi faire ? Pour la postérité ? C'est aussi vulgaire que l'argent, la postérité." Plus loin, il relance le sujet sur son public. "Je n'ai pas de public du tout, assène-t-il. À chaque fois, le métier veut me relancer parce qu'il m'aime bien, parce que je présente leurs trucs de César et de Cannes. Et tout à coup, je fais un film et ça ne marche pas du tout. Je n'ai pas dû jouer dans assez de bons films." Il ajoute : "Je le dis sans fausse modestie, ce n'est pas grave, ça viendra. À 50 ans, au cinéma, pour un homme, ça va."
Tout au long de l'interview, Édouard Baer apparaît cash, sans filtre, autant quand il parle d'argent en avouant qu'il "adore gagner plein de pognon" et qu'il se fait faire des chemises sur mesure par pur souci d'élégance, que quand il parle de ses collègues. Il ne tarit pas d'éloges sur Benoît Poelvoorde ("savoir qu'il existe, ça enchante ma vie"), parle de Gérard Depardieu avec une certaine admiration ("ce n'est pas forcément amusant de jouer avec Depardieu parce que ça ne l'amuse plus lui"), dézingue Fabien Onteniente qui lui a ôté sa liberté (ainsi que celle d'Alain Chabat) dans le film Turf, ou encore Fabrice Luchini. "Comme Luchini est quelqu'un de très cultivé, tout ce qu'il dit a l'air d'être le fameux 'bons sens'. Sauf que ce sont des âneries", lâche-t-il en parlant de cette interview où le volubile acteur "disait qu'avant de résoudre les problèmes des autres, il fallait d'abord s'occuper des siens".
Interview à retrouver en intégralité dans Society, numéro du 6 septembre 2018.