En l'absence du maître russe Ievgueni Pluschenko, champion d'Europe en titre, on attendait Joubert ; on a eu Amodio. En progression constante depuis plusieurs années, le gracieux, vif et enthousiasmant espoir du patinage français a éclos, avec une belle précocité : à seulement 20 ans, sacré champion de France pour la première fois en 2010, Florent Amodio est devenu hier, sur la glace de la Postfinance Arena de Berne (Suisse), champion d'Europe, dès sa première participation à l'épreuve continentale ! Un moment magique et une ascension fulgurante, un an seulement après son irruption dans le club des seniors et une première apparition olympique (12e à Vancouver).
Samedi, Brian Joubert partait de trop loin pour pouvoir revendiquer une quatrième couronne (après celles de 2004, 2007 et 2009) sur la scène européenne : le champion de France en titre (il a récupéré cette couronne-là en 2011), 7e à l'issue d'un programme court décevant plombé par un blocage sur le triple Lutz, qui ne voulait pas passer, a offert une véritable symphonie visuelle sur les notes de la 9e de Beethoven, samedi. Un programme libre de grande classe qui lui permet de décrocher l'argent, mais ne suffit pas à déloger un Florent Amodio en état de grâce de sa première place acquise à l'issue du programme court. Et si son passage, sur son programme libre, n'a pas été parfait (148,75 points contre 152,57 à Joubert), il l'a été... aux yeux du public : avec sa proposition moderne et attrayante inspirée de James Bond et rendant hommage à Michael Jackson, Amodio a emballé le public, qui acclamé à tout rompre le jeune homme en top disco et bretelles blanches (revivez son programme ci-dessus).
Roi du spectacle, maître de l'Europe du patinage, le jeune homme est également prince du charisme : plein de spontanéité et de fraîcheur en dehors de la glace comme dessus, Florent Amodio, après le verdict, explosait de joie, bondissait dans tous les sens, sautait dans les bras de son entraîneur Nikolai Morozov, puis dans ceux de son compatriote Joubert, en s'enthousiasmant du doublé tricolore - un doublé or-argent inédit depuis 1961, signale L'Equipe - et du bialn global des Français (Nathalie Péchalat et Fabian Bourzat avaient glané l'or en danse vendredi !).
Euphorique, le nouveau champion d'Europe s'est exclamé : "Le public a été grandiose, je n'arrivais même plus à entendre ma musique parfois. C'était magique. C'était quelque chose de spécial pour moi de concourir pour une médaille et de passer dans le dernier groupe. C'était une nouvelle expérience. Je n'arrive vraiment pas à y croire. C'est juste de la folie. Brian (Joubert) a eu une médaille, Nathalie (Péchalat) et Fabian (Bourzat) ont gagné. Vive la France !"
Un bien joli podium, complété par le Tchèque Tomas Verner afini 3e.
L'histoire, aussi, est belle pour ce garçon rayonnant né au Brésil et adopté alors qu'il n'était encore qu'un nourrisson par un couple français. Fin 2009, Florent racontait son retour au pays - une page tournée : "J'ai vu où j'étais né. Voilà. J'ai vu et j'ai pu mettre une image sur mes pensées et ça s'arrête là et c'est mieux comme ça." Une autre, qui promet d'être fantastique, s'ouvre.