Pékin, août 2008. Le relais 4x100 mètres nage libre tricolore est sur le point de glaner une médaille d'or bien légitime, tant les nageurs français dominent le monde du sprint. Mais alors qu'Alain Bernard, champion olympique du 100 mètres, s'apprête à toucher le mur, la consternation se lit sur les visages des relayeurs... Les Américains décrochent l'or pour huit centièmes, à peine un bout de doigt.
Londres, juillet 2012. Dans l'Aquatics Center de Londres en transe, le relais français devient champion olympique du 4x100 mètres nage libre, devant les Américains pour... 45 centièmes. Une revanche pour certains, une vendetta pour d'autres. Amaury Leveaux, Fabien Gilot, Clément Lefert et Yannick Agnel viennent de réaliser un authentique exploit, alors que le relais français a toujours terminé placé, mais jamais vainqueur dans les grandes compétitions internationales. Les quatre nageurs se sont imposés devant les meilleurs nations, dont les États-Unis et son Michael Phelps, 14 fois médaille d'or, ou encore les Australiens, dont la star James Magnussen, qui se sont inclinés face aux Bleus.
Un groupe au sommet de la vague
Des Bleus portés par tout le clan français, déjà surexcité après le titre de Camille Muffat sur 400 mètres un peu plus tôt dans la journée, et qui ont laissé éclater leur joie à l'issue de cette course époustouflante. Une course appréciée à sa juste valeur par une Laure Manaudou aux anges malgré sa désillusion de la matinée. Explosion de joie, hurlements, accolades, tout y est passé pour les quatre potes, qui n'ont pas manqué d'avoir une pensée pour leurs deux coéquipiers écartés de la finale mais qui avaient pris part aux séries du matin. "On a fait ce qu'on savait faire. Et puis voilà, champions olympiques. C'est génial, il faut aussi associer à ce titre Alain [Bernard] et Jérémy [Stravius] qui ont assuré les séries", confiait Yannick Agnel, nouveau prodige de la natation tricolore et auteur d'un 100 mètres de légende pour reprendre une demi-seconde à Ryan Lochte et terminer devant ce qui se fait de mieux actuellement en matière de natation...
"Alain, il le gagne aussi, il finit sur une belle médaille. Il est venu nous féliciter tout de suite. C'est plutôt une histoire de 7 mecs, ce soir, que de 4. Il ne faut pas oublier William [Meynard], Jérémy [Stravius], ne pas oublier aussi Frédérick [Bousquet], qui était là aussi il y a quatre ans. C'est un groupe de huit nageurs", ajoutait le "vieux" Fabien Gilot, présent dans l'équipe depuis 2006.
La joie du clan français
Côté émotions, les Quatre Fantastiques étaient servis à l'issue de cette course exceptionnelle qui a vu les nageurs remonter peu à peu chacun de leurs adversaires, avec un Yannick Agnel terminant comme il se doit cette course tant attendue, alors qu'eux-mêmes n'étaient pas attendus à ce niveau. "On est arrivés au self, on a vu les Australiens très tendus, un peu comme nous en 2008. Et on s'est dit, allons-y à la cool, comme on sait faire. En fait, ça marche plutôt pas mal", expliquait Amaury Leveaux. Même son de cloche chez Fabien Gilot : "Ça donne des ailes, beaucoup de satisfaction, le sentiment du devoir accompli, d'être récompensé de toutes ces années où on perd à pas grand-chose, où on ne nous fait pas de cadeau, où on crache sur le 4x100 mètres. Et aujourd'hui, on gagne la plus belle des médailles et ça, on ne pourra jamais nous le retirer."
Du côté de Nice, on jubilait, avec la présence de deux nageurs de la ville dans ce relais : le petit nouveau Clément Lefert et la star Yannick Agnel, qui pourrait bien aller chercher une autre médaille d'or sur le 200 mètres. "J'ai du mal à mettre en mots ce qui vient de se passer", racontait le premier... "C'est une journée sympa. C'est magique. On est parti sans trop de pression, on a fait ce qu'on savait faire, on est champions olympiques, c'est génial" poursuivait le second, finisseur impeccable de ce relais.
Les Bleus sont en or, quatre ans après la seconde place au goût amer de Pékin. La revanche est belle, la victoire encore plus. Et même les Américains ne pouvaient que constater, admiratifs, la perf' tricolore et celle d'un Yannick Agnel, impressionnant. "C'est dur. Mais Yannick a très bien nagé toute l'année, et ces gars ont réalisé un très grand relais ce soir", déclarait Michael Phelps, légende de la natation outre-Atlantique. L'entraîneur Eddie Resse n'en pensait pas moins : "Il m'a toujours fait peur car il est tellement à l'aise dans l'eau. C'est un spécialiste du 200 mètres. Ce qui signifie qu'il n'est jamais fatigué. Je n'aime pas ça, mais je dois reconnaître qu'il a fait fort. Il a été grandiose."