"C'est des malades ! C'est des malades !!!" L'effroi spectaculaire du postier noir, abandonnant dans sa fuite utilitaire et courrier aux humeurs belliqueuses de Godefroy de Montmirail et son écuyer Jacquouille la Fripouille, a marqué à jamais l'esprit de tous les spectateurs de la comédie Les Visiteurs.
Face au duo tonitruant formé par Jean Reno et Christian Clavier, l'acteur méconnu Moussa Théophile Sowié a fait hurler de rire le public en hurlant, lui, de terreur devant les hurluberlus venus du Moyen-Âge qui le prenaient pour "un Sarrasin". Tellement culte, la scène a même bénéficié d'une suite en forme de clin d'oeil, cinq ans plus tard, lorsque le réalisateur Jean-Marie Poiré a mis en scène le retour du tandem dans Les Couloirs du temps : Les Visiteurs 2 (1998) et l'a fait entrer en collision - littéralement - avec l'employé de La Poste. Lequel, devenu "LE" Sarrasin, avait alors quasiment la même ligne de texte, en prenant ses jambes à son cou...
Présent dans les documentaires dédiés en 2005 aux deux premiers volets mais en revanche absent du troisième épisode sorti bien après, Les Visiteurs : La Révolution (2016), Moussa Théophile Sowié, ne s'est pourtant pas sauvé loin du monde du cinéma, même s'il a depuis mené un parcours plus discret...
Formé à l'école d'art dramatique Jacques Lecoq, l'acteur d'origine burkinabée avait un bagage très léger au moment de sa participation au tournage des Visiteurs, constitué d'une apparition dans un épisode de la série Navarro en 1990 et, en 1991, d'un rôle secondaire devant la caméra d'Andrzej Żuławski pour La Note bleue - pour lequel le cinéaste disparu en 2016 filmait également sa compagne de l'époque, Sophie Marceau, auprès de Marie-France Pisier et Janusz Olejniczak en George Sand et Frédéric Chopin.
En 2000, après d'autres apparitions relativement subliminales (à nouveau dans Navarro et autres fictions télé, mais aussi au cinéma dans Louise (take 2), avec Elodie Bouchez dans le rôle-titre), Moussa Théophile Sowié jouait l'un des rôles principaux de Lumumba, un film de l'ancien ministre de la Culture haïtien (1995-1997) et ancien président de la Femis (2010-2019) Raoul Peck consacré à l'histoire de Patrice Lumumba, héros de l'indépendance de la République démocratique du Congo, dont il fut le premier Premier ministre, assassiné en 1961. Sowié y prêtait ses traits à Maurice Mpolo, l'un des ministres de son gouvernement. Dans la foulée, il faisait partie de la distribution de L'Alfrance (2001), centré sur un étudiant sénégalais placé en centre de rétention, et Mooladé (2002), sur le difficile sujet de l'excision en Afrique.
Après de longues années sans ajouter de ligne à son CV artistique, l'acteur revenait en 2012 dans ce registre engagé avec un rôle mineur dans Le Secret de l'enfant fourmi, qui suivait Audrey Dana au Bénin et au coeur des infanticides rituels ; puis il s'illustrait dans un registre plus léger en prenant part à deux comédies à succès en 2014 : Le Crocodile du Botswanga de Fabrice Eboué et Lionel Steketee, où il jouait un ministre (recroisant au passage Eriq Ebouaney, le Lumumba du film sorti en 2000) au sein d'un casting fameux assemblé autour de Thomas Ngijol, et Fastlife, de et avec le même Ngijol.
Impliqué en 2015, le temps d'une glissade sur une châtaigne, dans un court métrage présenté au Mobile Film Festival, Moussa Théophile Sowié tenait plus récemment l'un des rôles de Si tu voyais son coeur, un film de Joan Chemla porté par Gael Garcia Bernal et Marine Vacth.