Le 5 octobre dernier, les médias italiens ont appris la mort du réalisateur et scénariste Carlo Lizzani. Ce dernier, à qui l'on doit notamment Achtung! Banditi! ou encore La Chronique des pauvres amants (auréolé d'un Prix international à Cannes), s'est suicidé en sautant du balcon au troisième étage de son appartement à Rome. Il avait 91 ans.
Né en 1922 à Rome, Carlo Lizzani a commencé sa carrière comme un jeune assistant réalisateur et acteur avec Le soleil se lèvera encore (1946), avant de s'illustrer deux ans plus tard dans le format documentaire avec un film sur le dirigeant communiste italien Palmiro Togliatti. Paradoxalement, c'est avec le scénario d'Allemagne année zéro, long métrage de l'éminent Roberto Rossellini sorti en 1948, que Lizzani se distingue. Il poursuivra en collaborant au scénario de Riz amer, de Giuseppe De Santis, sorti en 1949.
Jeune journaliste militant, passionné de politique, obsédé par la Résistance et soucieux d'aller au plus près de la vérité, Lizzani s'orientera vers un cinéma engagé qui sera à l'image d'un septième art italien retrouvé sur les cendres du règne fasciste. Son premier long métrage, Achtung! Banditi! (1951), est un hommage exalté au combat des résistants antifascistes italiens. La Seconde Guerre mondiale sera également le décor du film L'Oro di Roma (1961), sur la déportation des juifs, puis Le Procès de Vérone (1963), sur l'exécution de Galeazzo Ciano par les extrémistes proches de Mussolini.
Derrière la caméra, c'est pourtant avec La Chronique des pauvres amants, en 1954, qu'il triomphera en remportant le Prix international du Festival de Cannes l'année de sa sortie. Le film était une adaptation d'un roman de Vasco Pratolini, sur lequel avait déjà planché quatre ans plus tôt un certain Luchino Visconti, avant de devoir y renoncer sous les pressions exercées par la censure. Carlo Lizzani l'évitera en filmant cette fameuse Via del Corno à Florence (il y observe de manière réaliste la vie quotidienne, des amours, des contrariétés et des disputes de leurs habitants) avec un fascisme sous-jacent, de moins en moins sournois alors qu'il filme son objet telle une romanzo corale (romance chorale).
Très engagé dans son cinéma comme dans la vie quotidienne, Carlo Lizzani s'est rapproché des idées de gauche et du syndicalisme, et fut notamment cosignataire d'une pétition contre le commissaire Luigi Calabresi, avant l'assassinat de celui-ci. Après avoir notamment coréalisé Guerre secrète au côté de Terence Young ou Christian-Jaque ou Du sang dans la montagne (1966), il prend la direction de la Mostra de Venise de 1979 à 1982, avant d'être chargé de cours à l'Académie Act Multimedia de Cinecittà, à Rome. Il quitte définitivement le monde du cinéma en 2005 après de nombreux projets restés dans l'anonymat.