C'est un deuil national pour l'Algérie, un deuil étendu à tout le monde arabe. Warda est morte au Caire à 72 ans jeudi 17 mai, et a été enterrée hier samedi 19 mai à Alger.
Le corps de la diva Warda El-Jazaïra (La Rose Algérienne) a été ramené samedi soir du Caire à Alger, par un avion spécial dépêché par le président algérien Abdelaziz Bouteflika. Morte au Caire comme ses illustres consoeurs, les ambassadrices de la chanson arabe devenues éternelles, la Syrienne Ismahane et l'Egyptienne Oum Koulsoum, Warda était algérienne. Elle avait mis sa vie et son art, la chanson engagée ou la chanson d'amour, au profit de la liberté dans son pays. Elle devait y revenir dans un futur proche pour y célébrer les 50 ans de l'indépendance de l'Algérie, le 5 juillet prochain. Une crise cardiaque l'a emportée avant cet important voyage.
En prévision de ces cérémonies, elle avait enregistré Mazal Ouakfin ("Nous sommes encore debout"), que la radio passe aujourd'hui en boucle, avec des témoignages, tandis que la télévision retransmet ses concerts. Toute la presse algérienne lui rend hommage samedi avec des dizaines de photos en une où elle apparaît souriante et heureuse. Le quotidien arabophone El-Khabar lui consacre cinq de ses 24 pages.
Au cimetière El-Alia d'Alger, le cercueil de Warda a été installé pour toujours dans le carré des moujahidine aux côtés des hommes les plus importants du pays, elle repose à jamais aux côtés d'autres combattants indépendantistes. Une haie d'honneur de la Protection civile a accueilli au cimetière son cercueil, ce qui est extrêmement rare pour une personnalité non-politique, suivi par son fils Ryad, la gorge nouée, démoli d'émotion, incapable de s'exprimer. Il a passé sa vie chez sa mère.
D'un père algérien et d'une mère libanaise, Warda est née à Puteaux (Hauts-de-Seine) en France. A onze ans, elle chantait dans le café de son père, le Tam Tam dans le quartier latin à Paris, puis dans le monde arabe des odes pour l'indépendance de l'Algérie, ce qui l'avait finalement obligée à quitter la France en 1958, quatre ans avant l'indépendance algérienne. Direction Rabat, puis Beyrouth. Un mariage avec un homme qui lui interdit de chanter. Un divorce parce qu'elle chante malgré tout. Puis un deuxième mariage en Égypte avec le compositeur Baligh Hamdi.
Cette chanteuse populaire, la plus populaire du monde arabe, une équivalence de Dalida, laisse un vide dans le coeur de tous son public. Des millions de fans.Des centaines de youyous de femmes qui ont assisté à cette cérémonie d'habitude réservée aux hommes, selon le rituel musulman dans ce pays, ont bercé la mise en terre de Warda, en présence de tous les intellectuels du pays. Les ministres des Affaires étrangères Mourad Medelci, de la Culture Khalida Toumi, et de la Communication Nacer Mehal, des artistes et des hommes de culture ont rendu un dernier hommage, comme le Premier ministre Ahmed Ouyahia et le frère du président Abdelaziz Bouteflika, Saïd Bouteflika, marchaient en tête du cortège, avec à leurs côtés notamment, le conseiller et ami d'enfance du roi du Maroc Mohamed VI, Fouad el-Himma.
Le chef de l'Etat Bouteflika a déclaré : "Elle, qui a dédié son art entièrement à l'Algérie, est décédée en Egypte loin de sa patrie."