L' AFP relate :
Ce mardi 21 février, Laura P. s'agrippe à la barre, sans que ça ne suffise à calmer les tremblements de son corps. Elle pleure, s'excuse, souffle et se lance, sous le regard de Saad Lamjarred et de la cour d'assises de Paris qui juge le chanteur star marocain pour viol aggravé.
Les faits remontent au mois d'octobre 2016. Elle a 20 ans et rend visite à des amis à Paris. Un soir, dans une boîte de nuit huppée, ils remarquent que plusieurs personnes viennent se prendre en photo avec un homme à la table voisine. C'est Saad Lamjarred, pop-star ultra connue dans le monde arabe. Les deux tables se rapprochent et Laura P. se met à discuter avec le chanteur dont elle n'avait jamais entendu parler.
"Avec des amis on avait prévu un voyage au Maroc. Il m'a dit qu'il pourrait me faire visiter. J'ai trouvé ça super gentil, je lui ai dit que je lui montrerai des lieux à Paris", raconte Laura P. en costume gris, longs cheveux châtains lâchés sur les épaules. Saad Lamjarred a un concert prévu dans quelques jours, il l'y invite, elle dit qu'elle essaiera de venir. Quand la boîte de nuit ferme, à 4h du matin, il est question de continuer la soirée ailleurs. "Je me suis dit pourquoi pas, je m'amuse bien, je m'entends bien avec cette personne". Laura P. se retrouve à un "after" dans une chambre d'hôtel avec Saad Lamjarred, une influenceuse issue de la téléréalité et l'ex-copain de cette dernière.
Terrorisée
"On poursuit la fête, on picole un peu, on danse", témoigne l'influenceuse, Nadège L., entendue en visioconférence. Il y a de la cocaïne, Saad Lamjarred en prend, pas Laura P., qui ne boit pas d'alcool non plus.
Saad Lamjarred "nous fait écouter sa musique", se souvient Nadège L. Lui et Laura P. "échangent des petits regards un peu mignons". Vers 6h du matin, la soirée déménage à l'hôtel du chanteur.
Laura P. assure qu'elle pensait que l'influenceuse et son ex viendraient mais finalement ils ne sont que tous les deux. "On a dansé, écouté de la musique, parlé de tout et de rien", assis sur la moquette, dit-elle. Et puis, "On s'est embrassés. Et là tout à coup, il a poussé ma tête qui a cogné par terre". Dans une sorte de long sanglot elle raconte la suite: son incompréhension, ses cheveux qu'il tire, à califourchon sur elle malgré ses refus répétés.
Il lui ordonne de retirer son t-shirt, elle s'exécute, "terrorisée", relate-t-elle en pleurs. Assis un mètre derrière elle dans la salle d'audience, Saad Lamjarred regarde au sol. Sur les bancs du public, sa femme qui avait dit la veille savoir "au fond d'elle" qu'il était "innocent" dans cette affaire et d'autres - il a été accusé de viol à Casablanca, New-York et Saint-Tropez -, garde le même sourire d'apparence qu'elle arbore depuis l'ouverture du procès.
Laura P. continue son récit pointilleux. Son corps qu'il lèche, un premier coup de poing, puis deux pénétrations digitales, vaginale et anale, et une brève pénétration pénienne. Avant qu'elle ne parvienne à le repousser. "Je l'ai mordu dans le bas du dos, j'ai repris un coup de poing". Laura P. parviendra à quitter la chambre et ce "cauchemar".
Ma version est complètement différente
"J'entends crier 'au secours, au secours'", témoigne à la barre la femme de ménage qui l'a recueillie et cachée dans une chambre. "Elle pleure, elle pleure, elle pleure", "elle tremble, elle avait peur", dit-elle aussi.
Son collègue "bloque le passage" à Saad Lamjarred, sorti de la chambre en caleçon. "Il s'est mis à genoux devant moi et m'a demandé de ne pas appeler la police", relate l'homme de ménage. Incarcéré dans la foulée, Saad Lamjarred, aujourd'hui 37 ans, passera sept mois en prison avant d'être placé sous contrôle judiciaire.
"Ma version est complètement différente. Je n'ai jamais, jamais, jamais pénétré Laura, ni avec mes doigts, ni avec mon sexe", dira Saad Lamjarred plus tard à la cour, avant d'ajouter : "Si quelque chose l'a affectée ou lui a fait peur, ce n'était pas du tout mon intention". Il sera interrogé mercredi, verdict vendredi.