L'âge d'or d'Hollywood et des films musicaux vient de perdre une autre de ses figures : Stanley Donen, réalisateur de Chantons sous la pluie, est mort à l'âge de 94 ans, selon une information dont le Chicago Tribune a en premier lieu eu la confirmation auprès d'un des fils du cinéaste. Alors que les amoureux des comédies musicales pleuraient récemment Michel Legrand, le bruit des claquettes de Stanley Donen, qui avait reçu en 1998 un Oscar d'honneur pour l'ensemble de son oeuvre, s'estompe lui aussi...
Né le 13 avril 1924 à Columbia en Caroline du Sud, Stanley Donen s'était épris enfant de la danse et du cinéma, au point de commencer à danser en cachette, à l'insu de ses parents, avant d'obtenir d'eux qu'il puisse suivre un cours. Fasciné par Fred Astaire, qu'il avait découvert à 9 ans dans Carioca, il poursuit son rêve et part tenter sa chance sur les scènes de Broadway, où il va faire en 1940 une rencontre déterminante : celle de Gene Kelly. Après toute une décennie à oeuvrer ensemble, Donen officiant comme danseur et chorégraphe au côté de Kelly dans maintes productions des studios MGM et Columbia, leur complicité et leur vision moderne, qui fait sortir la comédie musical des music-halls, vont alors engendrer en 1949 Un jour à New York, une comédie musicale en extérieur qu'ils réalisent à quatre mains et mettant en vedette Fred Astaire, puis Chantons sous la pluie (1952) et Beau fixe sur New York (1955), leur troisième et dernière collaboration.
Entre ces deux derniers, Stanley Donen avait déjà réalisé en solo plusieurs films : Mariage royal, dirigeant Fred Astaire et Jane Powell, Une vedette disparaît, avec une jeune Elizabeth Taylor (avec laquelle il nouera, à un moment, une brève idylle), Donnez-lui sa chance, avec Bob Fosse (qu'il retrouvera ensuite sur Pajama Game et Damn Yankees, deux musicals cultes de Broadway) et Debbie Reynolds, ou encore Les Sept femmes de Barberousse, l'un de ses plus grands succès.
Après avoir signé en 1957 Drôle de frimousse, tourné en partie à Paris, avec Audrey Hepburn et Fred Astaire, Stanley Donen, le genre du film musical s'essoufflant, s'essaye avec succès à la comédie romantique : Indiscret (1957), Ailleurs l'herbe est plus verte (1962), Charade (1963, avec Audrey Hepburn), tous trois avec Cary Grant, Arabesque (1965, avec Gregory Peck et Sophia Loren)... Il réalise ensuite trois films personnels avec Voyage à deux (1967), Fantasmes (1967) et L'escalier (1969). Sa production se raréfiera et il se retirera du cinéma après C'est la faute à Rio (1984), restant toutefois actif dans le milieu (organisateur de la cérémonie des Oscars 1985, chorégraphe sur une série télé, metteur en scène à Broadway).
Quatorze années après son dernier film, Stanley Donen aura droit une ovation à tout rompre sur la scène des Oscars (où il n'avait jusqu'alors été nominé qu'une fois), recevant en 1998 un Oscar d'honneur des mains de Martin Scorsese pour l'ensemble de son oeuvre "marquée par la grâce, l'élégance, l'humour et l'innovation visuelle". Il fait alors chavirer l'assistance en chantant le standard Cheek to Cheek et en faisant un petit numéro de claquettes avec sa statuette pour partenaire. En 2010, année où on le verra en France pour l'inauguration à Lyon du Festival Lumière, un documentaire intitulé Stanley Donen: You Just Do It retraçait sa carrière, essentielle dans l'histoire du 7e Art.
Stanley Donen a eu trois fils (dont l'un est décédé en 2003 à 50 ans) et a été marié à cinq reprises, notamment avec Jeanne Coyne, Marion Marshall et Yvette Mimieux, avant de passer la fin de sa vie au côté d'Elaine May.