Mickey est dans une mauvaise passe. Très abîmé par l'échec colossal de John Carter, le studio Disney est emporté dans une nouvelle tornade de sable avec The Lone Ranger, le western de Gore Verbinski avec Johnny Depp. Retardé pendant plusieurs mois pour réduire les coûts et les risques, le blockbuster explose actuellement son énorme budget, la faute à une production chaotique.
Traversée du désert
The Lone Ranger était un pari risqué depuis le début. Annoncée en 2002 par la Columbia avec un budget de 70 millions, cette adaptation de la série télévisée éponyme est passée dans les mains de nombreux scénaristes et studios avant d'atterrir chez Disney en 2008, via le producteur Jerry Bruckheimer. L'arrivée de Johnny Depp et Gore Verbinski (Pirates des Caraïnes) deux ans plus tard confirme que les cow-boys sont de retour, portés par le duo qui avait redoré le blason des pirates.
Mais les 250 millions de budget sont durs à avaler pour les patrons de la machine Mickey. La contre-performance du blockbuster Cowboys et Envahisseurs (2001) avec Harrison Ford et Daniel Craig confirme que le public ne s'intéresse pas au western, et que le prix à payer est trop élevé. Au cours de l'été 2011, le tournage de The Lone Ranger est repoussé pour réduire les coûts et réécrire le scénario. Après avoir essayé de se débarrasser du réalisateur, vivement défendu par le fidèle Johnny Depp, Disney impose un réduction du budget, qui passe de 250 à 215 millions. Parmi les victimes de cette décision : les salaires des acteurs et quelques scènes spectaculaires.
Indiens des Caraïbes
L'histoire est loin d'être terminée. Trois mois après le début du tournage, lancé en mars dernier, des bruits sur les coulisses mouvementées de The Lone Ranger sont lâchés sur la scène publique via le Hollywood Reporter. Prévu sur 120 jours, le calendrier va devoir être rallongé de quelques jours voire semaines, tandis que le budget pourrait dépasser les 250 millions redoutés.
Les raisons de ce désastre financier en sommeil sont à chercher du côté de Gore Verbinski, épinglé comme le principal responsable. Parmi ses caprices, il aurait ainsi exigé la construction de trains d'époque, refusant d'utiliser des machines déjà existantes. Les rudes conditions climatiques du désert ayant en plus endommagé une partie des décors, The Lone Ranger est maintenant en phase de réécriture, le studio essayant de contrôler du mieux qu'il peut le budget en coupant plusieurs scènes. Une décision qui provoque naturellement un conflit avec Verbinski, qui avait déjà accepté de zapper une importante scène d'action sur un train pour permettre au film d'être validé.
La ruse de Mickey
Fraîchement arrivé pour remplacer Rich Ross, remercié par Disney après le bide John Carter, le nouveau boss Alan Horn va devoir assumer les conséquences d'une production validée bien avant son arrivée - un autre point commun avec son prédécesseur. Mais le studio de Mickey n'est pas dupe, et une telle situation était visiblement prévue.
Parmi les conditions pour valider le blockbuster, Disney avait ainsi demandé à ce que tout dépassement de budget soit assumé par la société de production de Jerry Bruckheimer. Mauvaise pioche pour le célèbre producteur hollywoodien (Pirates des Caraïbes, Bad Boys) qui doit actuellement harceler Gore Verbinski pour limiter la note.
Mais The Lone Ranger n'est qu'un exemple parmi d'autres aberrations du système, très récurrentes ces derniers temps. La sortie de G.I. Joe 2 : Conspiration a été repoussée de neuf mois pour permettre à Channing Tatum de revenir d'entre les morts, tandis que Brad Pitt est rappelé pour sept semaines de tournage supplémentaires de World War Z, actuellement en cours de réécriture sous la houlette de Damon Lindelof (Prometheus). Reste à savoir si The Lone Ranger rencontrera le même succès que Men in Black III, un autre film marqué par un tournage chaotique, ou s'il sombrera dans les eaux comme John Carter.
Geoffrey Crété