L'art contemporain suscite de nombreuses critiques et certains de ses détracteurs regrettent qu'il soit trop conceptuel et élitiste, et bien trop éloigné des préoccupations du grand public. L'un des reproches principaux est que les oeuvres créées seraient incompréhensibles sans explications. Le marché de l'art contemporain est également critiqué car vu comme une bulle spéculative où les oeuvres sont vendues à des prix exorbitants, parfois déconnectés de leur valeur artistique réelle. Cette marchandisation excessive aux yeux de certains est perçue comme un détournement de la vocation première de l'art, à savoir éveiller les sens et l'esprit. L'art contemporain continue néanmoins d'attirer un public curieux et de susciter des débats passionnés. La vente aux enchères le 20 novembre prochain de "Comedian", l'oeuvre de l'italien Maurizio Cattelan, en est la preuve. Le concept ? Une banane fixée au mur par un ruban adhésif, ni plus, ni moins.
Exposée pour la première fois en décembre 2019 à Art Basel Miami Beach, la galerie avait acquis une des trois versions de l'oeuvre pour 120 000 dollars. Les deux premières éditions, elles, avaient été achetées pour 120 000 dollars chacune par le galeriste français Emmanuel Perrotin. L'oeuvre de l'artiste italien est désormais estimée entre 1 et 1,5 million de dollars et sera donc mise aux enchères par Sotheby's à New York ce mercredi 20 novembre 2024. Cette édition de "Comedian" portera la mention "2 sur 3" et son nouveau propriétaire recevra un certificat d'authenticité et le protocole de conservation de l'oeuvre. En effet, la banane doit être remplacée tous les sept jours pour éviter qu'elle ne pourrisse. Connu pour ses oeuvres décalées, Maurizio Cattelan aime mêler humour et provocation. Au média The Art Newspaper, il avait confié par le passé au sujet de "Comedian" : "Pour moi, Comedian n'est pas une blague. C'est un commentaire et une réflexion sur ce à quoi on donne de la valeur. Aux foires artistiques, la rapidité et le business règnent. Alors je le vois comme ça : si je dois être à une foire, je dois pouvoir vendre une banane comme d'autres vendent leurs tableaux. Je dois pouvoir jouer à l'intérieur du système, mais avec mes propres règles".
Lors de son exposition pour la première fois en décembre 2019 à Art Basel Miami Beach, l'oeuvre de Maurizio Catellan avait été... mangée par l'artiste américain David Datuna. Ce dernier l'avait décrochée du mur avant de la dévorer et de déclarer : "Des millions de personnes meurent de faim. Et il met trois bananes sur le mur pour un demi-million de dollars ?". Puis au cours d'une autre exposition, cette fois-ci dans un musée à Séoul en 2023, c'est un étudiant coréen qui s'est fait le malin plaisir de la manger. Questionné par les médias locaux, il avait expliqué son acter comme une "rébellion contre la rébellion". "Abîmer une oeuvre d'art peut aussi être considéré comme une oeuvre d'art, j'ai donc pensé que ce serait intéressant... N'est-elle pas scotchée là pour être mangée ?", a-t-il demandé. De son côté, l'artiste italien n'y avait vu aucun souci et avait confié au Guardian que le fait que son oeuvre soit mangée ne lui posait "Pas de problème" puisque ce n'est pas la banane en elle-même qu'il a vendue mais un concept.