Depuis un an, observateurs, critiques comme politiciens s'agitent autour de Zero Dark Thirty. Le film a provoqué, depuis sa fin de production au printemps dernier, une longue polémique qui a pris un nouveau virage le 9 janvier dernier. En effet, l'académicien et acteur David Clennon (The Thing, Syriana) a lancé une bombe sur le site truth-out.org en appelant ses confrères académiciens à ne pas voter pour le film de Kathryn Bigelow. Pire, l'acteur a également comparé le film de l'ex-femme de James Cameron au documentaire estampillé pro-nazi de Leni Riefenstahl, Le triomphe de la volonté, dont les talents de propagandiste étaient entrés dans l'histoire américaine avec l'un des films les plus racistes, Naissance d'une nation (1915).
Déjà bousculée par quelques critiques négatives et le parti-pris du sénateur John McCain qui a sommé le FBI de livrer les sources ayant servi au film, la réalisatrice Kathryn Bigelow ne pouvait pas laisser passer cela. Après avoir pourtant défendu son film, elle a tapé du poing sur la table avec calme et sérénité, dans les colonnes du LA Times à travers une lettre publiée le 15 janvier. En effet, après n'avoir obtenu qu'un Golden Globe (Meilleure actrice dans un drame pour Jessica Chastain), Zero Dark Thirty pourrait voir sa campagne pour les Oscars violemment entachée par la sortie virulente de cet académicien.
"Ceux qui travaillent dans les arts le savent, la description n'est pas l'approbation", a-t-elle commencé à dire, le regard tourné vers les critiques affirmant que le film véhiculait une image pro-torture. Après avoir expliqué les difficultés rencontrées par son équipe lors de la mise en production du film, Kathryn Bigelow évoque son soutien total aux partisans du combat anti-torture "et plus largement, un quelconque traitement inhumain".
Une confusion qui selon l'intéressée pourrait "refroidir la capacité de n'importe quel artiste américain voulant faire la lumière sur de sombres actes de bravoure", trop obscurs pour le gouvernement. Revenant sur le sujet brûlant reproché à son film, Kathryn Bigelow souligne une forme d'aveuglement pratiqué par certains "refusant ou ignorant" le rôle joué par la torture dans la lutte antiterroriste. D'autant que Zero Dark Thirty montre bien ce rôle tenu par la torture lors des premières années de traque, point évoqué par la réalisatrice dans sa lettre, celle-ci expliquant clairement son opinion en assurant "qu'Oussama Ben Laden a été trouvé grâce à l'ingénieux travail de détection", visant notamment l'aide de Palestiniens pour trouver la cache du terroriste le plus recherché du monde. "Ce qui ne signifie pas que c'est la clé qui a permis de retrouver Ben Laden" a précisé la réalisatrice, avant d'ajouter que "c'est une partie de l'histoire qu'on ne peut pas ignorer".
Face aux différentes attaques, Kathryn Bigelow n'oublie pas de rendre hommage au combat mené de l'intérieur. Elle termine ainsi sa réponse en saluant ceux qui "ne sont pas des super-héros descendus du ciel" mais des hommes et femmes qui "ont tout donné d'eux-mêmes, dans la défaite comme la victoire, à la vie et à la mort, pour la défense de cette nation".