Algérie, le pays de toutes les révoltes, un reportage signé Enquête exclusive et diffusé sur M6 dimanche 20 septembre 2020, a fait grand bruit. Bernard de La Villardière et son équipe ont tourné entre Alger et Ouargla des images de la jeunesse algérienne qui se déchire en temps de hirak, le mouvement de protestation qui a vu le jour en février 2019. Ce numéro d'Enquête exclusive a suscité bon nombre de réactions, les internautes jugeant le reportage mensonger et la youtubeuse Noor, présentée comme femme soumise à son mari, a aussi pris la parole. Désormais, c'est Ramy Sellam, manager de la comédienne Nardjes Asli également présente dans le reportage, qui pousse un coup de gueule.
"Tout est illégal, faux et illicite dans ce documentaire, assure-t-il à nos confrères d'Algérie Part. Au départ, il était question d'un documentaire socioculturel sur la jeunesse algérienne. Il n'a jamais été convenu de parler du hirak ou des événements politiques qui secouent le pays. Lorsque le projet du documentaire a été présenté à Nardjes et aux autres personnages, il était question d'aborder sujets culturels, sociétaux et économiques."
Plus encore, Ramy Sellam indique que Zaina Izabachene, réalisatrice du documentaire tourné à Alger à la rentrée 2019, aurait omis d'évoquer certaines conditions du tournage. "Elle n'a informé personne qu'il s'agit d'une production pour Enquête exclusive de la chaîne de télévision M6. Aucun des personnages du documentaire n'a donné son consentement pour apparaître sur M6", lance-t-il, ajoutant même que "l'autorisation de tournage fournie par une agence de production locale à Alger" ne serait "pas légale". Il a d'ailleurs "saisi" la direction générale de M6, l'agence de production Ligne de Front, en charge de ce numéro d'Enquête exclusive, l'ambassade de France à Alger ainsi que le CSA français. "Malheureusement, nous n'avons jamais reçu la moindre réponse", déplore-t-il à J+2 de la diffusion.
De son côté, le gouvernement a pris des mesures drastiques. Via un communiqué publié lundi 21 septembre au soir, le ministère algérien de la Communication dénonce "une fausse autorisation de tournage", une infraction "au demeurant sévèrement sanctionnée", révélant au passage avoir refusé une demande de tournage pour Enquête exclusive à Oran en mars 2020. Et c'est ainsi que la dure décision a été prise : "Ce précédent nous conduit à décider de ne plus autoriser M6 à opérer en Algérie, sous quelque forme que ce soit."
Mais ce n'est pas tout : le ministère accuse le reportage de "porter un regard biaisé sur le hirak" et regrette des "témoignages insipides", des "clichés les plus réducteurs" ainsi que des "anecdotes sans profondeur". Des poursuites pour "faux en écriture authentique ou publique" devraient être engagées. Le ministère ajoute qu'il "n'est pas fortuit que ces médias, outillés pour exécuter un agenda visant à ternir l'image de l'Algérie et à fissurer la confiance indéfectible établie entre le peuple algérien et ses institutions, agissent de concert et à différents niveaux et supports".
La réaction de la chaîne est attendue. De son côté, Bernard de La Villardière ne s'est pas exprimé non plus. Toutefois, sur Twitter, il a partagé le message du journaliste franco-algérien Mohamed Sifaoui. "Que M6 - désormais interdite en Algérie après la diffusion d'un reportage d'Enquête exclusive par Bernard de La Villardière - ne s'étonne pas, même des Algériens sont interdits en Algérie parce qu'ils ont exprimé une opinion. Ce régime n'aime que les corrupteurs et les islamistes !", peut-on lire sur le site de microblogging.