C'est l'un des meilleurs joueurs français... mais l'un des moins médiatisés. A 30 ans, Gilles Simon fait toujours partie des trop peu nombreux tricolores capables de briller sur le circuit mondial, ces dernières années. Une réussite qu'il doit également à une femme, sa femme, qui a tout sacrifié pour lui : Carine Lauret. Discrète, à l'image de son homme depuis dix ans, celle-ci n'a pourtant pas la langue dans sa poche. A l'occasion de l'Open d'Australie - où il a malheureusement été éliminé par David Ferrer au 3e tour -, la maman de ses deux enfants, Valentin et Timothée, raconte avec une incroyable (voire bouleversante) franchise, dans les pages de L'Equipe, sa vie dans l'ombre d'un champion. Avec ses moments de joie mais aussi de blues...
"Gilles m'a déracinée"
Tout a donc commencé il y a 10 ans pour Carine Lauret. Alors au service communication de Bouygues, la jolie jeune femme rencontre vite Gilles Simon, qui vient tout juste de passer professionnel. Un véritable changement dans sa vie puisqu'au bout d'un an et demi, le sportif lui demande de quitter son job pour le suivre dans les tournois aux quatre coins du monde. "Au début, ça me plaisait beaucoup, se souvient-elle. Gilles m'a permis de découvrir le monde. Les beaux endroits, les beaux hôtels, la vie sans contraintes, sans cuisine, sans ménage", ajoute-t-elle dans L'Equipe.
Malheureusement, les premières limites apparaissent. Carine Lauret découvre alors que le regard des autres change. Elle devient vraiment la "femme de", celle qui n'a "aucun problème de fric". "Ça m'a gonflée", écrit-elle avec franchise. En s'ouvrant à un autre monde, elle se coupe en effet des siens. Et Carine ne passe plus qu'au second plan. "En fait, petit à petit, Gilles m'a déracinée, constate-t-elle. J'ai coupé les ponts avec les gens que j'aimais. Et j'ai perdu ma personnalité. Même ma mère me présentait en disant : "C'est la femme de Gilles Simon." Parfois, mes proches m'appelaient juste pour me demander des nouvelles de Gilles. Je n'existais plus trop et j'en ai eu marre."
"Je me dis que je suis une merde, que je vaux rien"
Pour se ressourcer, Carine Lauret arrête de suivre Gilles Simon. Elle quitte sa bulle pour revenir à la réalité, au travail, à Paris, pendant un an et demi. "Et c'est là, en 2008, qu'il a tout pété !", regrette-t-elle à demi-mot. Elle devient alors la compagne d'un tennisman à succès, en apprend plus dans les journaux que par son amoureux, ce qui a le don d'agacer ce fort caractère. "Je n'ai plus du tout aimé être la femme de (...) J'avais une overdose de mon mec alors que je ne le voyais plus !", avoue-t-elle à propos de son homme, qu'elle aime pourtant "à la folie". Le contre-coup se fait également sentir en son for intérieur. "C'est très difficile de trouver sa place. D'un côté, j'éprouve une fierté sans limite pour lui. De l'autre, je me dis que moi je suis une merde, que je vaux rien", souffre-t-elle.
D'autant que Carine s'est sacrifiée. Ses ambitions personnelles ont été reléguées au second plan pour Gilles. "J'avais 24 ans quand je l'ai connu, j'avais une ambition énorme, l'envie de faire plein de trucs mais tous mes projets ont été arrêtés", raconte-t-elle. Amoureuse et impliquée, Carine semble d'ailleurs l'être toujours autant, après 10 ans. Au point de prendre les choses un peu trop à coeur et de "tomber dans une espèce de dépression avec lui", quand, en avril 2013, Gilles revient à la maison, à Neuchâtel (Suisse), après avoir perdu un point décisif en Coupe Davis, en Argentine.
"Qu'est-ce que vous voulez que je lui dise moi, à Mirka Federer ?"
Dans ces moments-là, ce sont Valentin (1 an) et Timothée (4 ans) qui redonnent le sourire à Carine et Gilles. "Heureusement, avec les enfants, je remonte toujours car je suis occupée à autre chose. D'ailleurs quand il va mal, j'essaye de l'impliquer avec les enfants car ce sont les seuls qui peuvent nous faire oublier le tennis", dit-elle à propos de ses petites têtes adorées, descolarisées pour pouvoir voyager avec papa et maman. La maternité aura en plus été un déclic pour Carine, qui a vu son statut changer. "Depuis, je ne suis plus la plante verte qui attend son mec (...) Je suis passée de "femme de..." à "maman de..."", explique-t-elle. Elle reconnaît toutefois que cela a entraîné de nouvelles contraintes. "Avec Gilles, on a du mal à partager des moments car les petits prennent une énorme place", dit-elle.
Avec son franc-parler, Carine pose ensuite un regard détonnant sur ses homologues. "Je n'ai pas d'amies sur le circuit (...) les nanas de Federer, Djokovic ou autres sont inaccessibles. Des fois, tu essaies les sourires mais ça ne revient pas... Elles sont perchées, entourées de mille personnes", ose-t-elle lâcher. Elle prend notamment le cas de la femme de Roger Federer. "Qu'est-ce que vous voulez que je lui dise moi, à Mirka Federer ? Elle a quatre nounous par enfant, on ne vit pas dans le même monde", juge-t-elle.
Elle pourrait peut-être lui parler de ses sentiments pour Gilles. Car malgré les coups de blues, les sacrifices et les désillusions qui ponctuent parfois la vie d'un sportif mais aussi d'un couple, le principal est bien là pour Carine Lauret et Gilles Simon. Il s'agit bien sûr de l'amour, comme elle le résume parfaitement en quelques mots : "On s'aime, on s'aime, on s'aime. Si je fais tout ça, c'est parce que Gilles, je ne peux pas vivre sans lui."