Le Parquet national financier a requis mercredi un procès devant le tribunal correctionnel pour corruption et trafic d'influence contre la ministre de la Culture Rachida Dati et l'ancien patron du groupe automobile Renault-Nissan, Carlos Ghosn. C'est ce qui a été indiqué par le ministère public ce vendredi 15 octobre.
Les deux contestent les accusations, dans un dossier judiciaire instruit depuis 2019 à Paris et aux lourds enjeux politiques actuels, Rachida Dati étant l'une des principales figures du gouvernement de Michel Barnier.
Rachida Dati est soupçonnée d'avoir perçu 900.000 euros de la part de RNBV, filiale de l'alliance Renault-Nissan, sans contrepartie d'un travail réel, entre 2010 et 2012, alors qu'elle était avocate et députée européenne (2009-2019) - ce qui pourrait avoir servi à masquer une activité de lobbying au Parlement européen.
Dans le détail, le Parquet national financier (PNF) a confirmé avoir requis contre Mme Dati un procès pour recel d'abus de pouvoir et d'abus de confiance, corruption et trafic d'influence passifs par personne investie d'un mandat électif public au sein d'une organisation internationale, le Parlement européen.
"Un réquisitoire n'est que la vision du parquet d'un dossier. Il n'est pas le reflet de la réalité", ont réagi les avocats de Mme Dati auprès de l'AFP. "S'ouvre maintenant un délai légal au cours duquel nous allons répondre point par point pour contrecarrer cette vision parcellaire et inexacte", ont assuré Mes Olivier Baratelli et Olivier Pardo.
La ministre de la Culture, qui a aussi été dans le passé ministre de la Justice, considère notamment ces faits prescrits et a déjà multiplié les recours en ce sens pour mettre fin aux poursuites. Mais en vain. En effet, le 15 octobre dernier, on apprenait que la Cour de cassation n'a pas admis le pourvoi formé par Rachida Dati dans cette affaire.
La Cour avait jugé que "ni l'intérêt de l'ordre public ni celui d'une bonne administration de la justice ne command(aient) l'examen immédiat" de ce pourvoi. La défense de Mme Dati avait aussi demandé la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), refusée par la cour d'appel de Paris en juillet. La Cour de cassation avait également déclaré irrecevable cette QPC. Contactés, les quatre conseils de Mme Dati, Mes Olivier Baratelli, Olivier Bluche, Olivier Pardo et Benjamin Mathieu, n'avaient pas souhaité s'exprimer à ce stade.
Carlos Ghosn est, lui, visé depuis avril 2023 par un mandat d'arrêt international. Il risque un procès pour abus de pouvoirs par dirigeant de société, abus de confiance, corruption et trafic d'influence actifs, dans un dossier où l'entreprise Renault s'est constituée partie civile.
Celui qui possède les nationalités libanaise, française et brésilienne, a été arrêté fin 2018 au Japon où il devait être jugé pour des malversations financières présumées quand il était à la tête du groupe Renault-Nissan. Il a trouvé refuge au Liban fin 2019 après une fuite rocambolesque du Japon. Ses avocats n'étaient pas joignables dans l'immédiat.
La décision finale sur la tenue d'un procès éventuel revient aux juges d'instruction chargés du dossier, le PNF précisant qu'un recours est toujours pendant devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris.
Rachida Dati et Carlos Ghosn restent présumés innocents des faits qui leur sont reprochés jusqu'à clôture définitive du dossier.