A 42 ans, Thomas Langmann est un homme comblé. Hanté et habité par les secrets, mais il reste comblé. Avec le triomphe avec The Artist, Thomas Langmann s'est trouvé un autre équilibre, plus personnel, autour de sa fille (Lou, née en 2002) et désormais une femme (Céline Bosquet, avec qui il s'est marié en Corse devant près de 150 invités dont ses plus proches amis).
C'est cet homme que Frédéric Beigbeder a eu la chance de rencontrer pour un entretien sans concession, passionnant et émouvant à la fois, pour le magazine Lui. D'emblée, il évoque sa famille, très particulière et "turbulente" pour reprendre son adjectif. L'enfant de star raconte alors son père, le réalisateur Claude Berri, ainsi que sa mère, Anne-Marie Rassam, ou encore son oncle, le très rude Jean-Pierre Rassam.
Anecdote, quand tu nous tiens
Décrivant "la normalité" de son quotidien à la maison au 7, rue Beaujon, ou encore "le charme insensé" de sa mère, il empile ses délicieuses anecdotes, comme lorsqu'Anne-Marie Rassam l'a emmené à Londres, avec deux copines lesbiennes, voir le concert de Stray Cats. "Ma mère, évidemment, ne les connaissait pas, je ne sais pas comment on a atterri dans la loge des Stray Cats, on les a ramenés dans l'avion à Paris et ils ont habité une semaine chez nous". Une femme au passif de maniaco-dépressive – ce qui lui coûte la vie lorsqu'elle se défenestre en 1997 – qui, parmi ses plus beaux secrets, aura "entretenu pendant des années une histoire d'amour uniquement épistolaire" avec François Truffaut, pourtant témoin au mariage de son ami Claude Berri. Thomas Langmann, qui dit avoir hérité de toutes ces lettres magnifiques, pourrait bien vouloir en faire quelque chose un jour.
Une enfance étonnante que le jeune Langmann a vécue entre Paris et la Californie, où il se rendait souvent, puisque sa famille était proche des Coppola. Lui à 7 ans était amoureux de Sofia Coppola. De la future réalisatrice, il garde un souvenir amusé et amusant : "Je suis fait piquer par une guêpe et je hurle. Francis arrive et me dit : 'Ne bouge pas', et il appelle Sofia, dont j'étais très amoureux. Et il prend ma main et dit à Sofia : 'Pisse-lui dessus !'."
Forcément imbibé de ce passé fait d'histoires incroyables, Thomas Langmann se souvient également de Jean-Pierre Rassam - son oncle, frère de sa mère Anne-Marie et compagnon de Carole Bouquet -, un homme "plus flamboyant" que ne pouvait l'être son propre père. Les deux modèles n'ont d'ailleurs jamais été très loin, lorsque par exemple en 1968, lorsque Berri et ses amis arrêtaient le Festival de Cannes dans un climat politique spécial, son oncle produisait quelques années plus tard le film Chronique des années de braise. "Qu'est-ce qu'il a fait ? Il a emmené Robert Favre Le Bret dans une voiture et l'a menacé de mort. Je suis sûr que c'est vrai. Et le film a obtenu la Palme d'or", conte Thomas Langmann.
Des récompenses et un manque énorme
Ex-sale gosse du cinéma français si on en croit sa réputation évoquée par Beigbeder, Thomas Langmann est devenu ce producteur à succès dont la France ne peut être que fier. The Artist le consacrera, lui qui devient alors l'unique producteur français à remporter l'Oscar du meilleur film. Après une jeunesse mouvementée, la création de La Petite Reine, des succès, c'est à lui d'écrire une page de l'histoire du cinéma français. Et "il y a un prix dont je suis très fier", nous dit-il : "Le Darryl Zanuck Awards", remis par la Producers Guild of America des mains de Steven Spielberg.
Puis il se souvient : "Toutes ces récompenses ont souligné un manque énorme. Je me disais : mon Dieu, c'est injuste d'avoir tout ce bonheur, cette reconnaissance, et de ne pas avoir quelqu'un d'intime, une femme avec qui le partager." Il devra attendre 2013, et notamment le Festival de Cannes en mai pour officialiser avec la belle Niçoise et journaliste Céline Bosquet. Déjà papa d'une petite Lou, il affiche son bonheur avec ses "deux cadeaux du ciel". Reste cette famille, partie vers les cieux pour trois de ses membres éminents, qui manque à l'appel pour partager son bonheur, ou connaître sa femme. Lorsqu'elle présente ses parents dans le Lubéron, lui présente les siens d'une manière très imagée : "Je vois un ciel rempli d'étoiles et je le dis 'Céline, viens', elle a regardé le ciel et je lui ai dit 'voilà, je te présente ma mère, Anne-Marie, je te présente mon père, je présente Julien' (son frère décédé ndlr) et je lui ai montré les étoiles pour lui présenter ma famille."
Interview à retrouver dans son intégralité dans le numéro 2 du magazine Lui.