Dans Orléans, publié aux éditions Grasset le 21 août 2019, Yann Moix raconte son enfance entre violence physique et verbale. Bien que vendu dans la catégorie roman, le récit de l'ancien acolyte de Léa Salamé dans On n'est pas couché (France 2) sonne comme une autobiographie. Des faits terrifiants démentis par Alexandre, le frère de l'écrivain, et leur père José. Dimanche 25 août, dans Paris Match, deux amis d'enfance de Yann Moix prennent à leur tour la parole, défendant la version de leur camarade.
S., architecte de profession, fréquente Yann Moix depuis sa plus tendre enfance. Il témoigne aujourd'hui sans vouloir divulguer son identité pour éviter "que la haine déversée sur les réseaux sociaux autour de l'histoire de Yann, notamment par son frère Alexandre, ne [l']atteigne". S. assure que le cadet "a déjà monté un site internet contre Yann". "Cela fait longtemps qu'il utilise ces canaux pour lui nuire. Il fut un temps où Yann le soupçonnait de modifier sa page Wikipedia. Alexandre éprouve, je pense, un véritable ressentiment envers Yann, poursuit-il. Que ce dernier n'ait pas été tendre avec lui, je peux le croire. Leur père ne battait que Yann, et peut-être qu'en retour, lui se vengeait. Mais je n'ai jamais assisté chez eux à pareille scène. Alexandre avait quatre ans de moins que nous, et enfants, nous ne nous préoccupions absolument pas de lui (...). Cette haine entre eux, je l'ai perçue plus tard. Quand Yann, déjà écrivain, m'a annoncé qu'il coupait les ponts avec son frère."
Petit déjà, S. savait Yann Moix battu par son père. "Je savais que son père le frappait, je savais qu'il déchirait les BD que nous écrivions ensemble puisque j'étais chargé de les planquer, mais j'ignorais que les choses étaient allées si loin, regrette-t-il. La peur de Yann était palpable. Il marchait en permanence sur des oeufs. La fureur de son père dont j'ai été parfois témoin n'avait rien à voir avec les colères et les gentilles remontrances du mien : elle se lisait sur son visage. On sentait que dès qu'on aurait tourné le dos, ça barderait pour lui." Souvent, la mère de S. appelait le père de Yann "pour excuser ce dernier du moindre retard, parce qu'il redoutait d'être battu". Les deux jeunes garçons savaient "qu'il ne fallait pas faire de vagues", sinon l'écrivain risquait "une rouste", "une raclée"... "pour un oui, pour un non, à coups de ceinture, de rallonge électrique..." D'ailleurs, chez les Moix, "il y avait un martinet accroché au milieu de la cuisine". Mais Yann Moix n'était pas un enfant "facile" : S. concède qu'il était même "ingérable", "turbulent" et qu'il agaçait les professeurs. Ceci n'explique toutefois pas ce jour où l'enfant avait débarqué en classe en pyjama, ni cet oeil au beurre noir dont se souvient S.
Des propos qui rejoignent ceux tenus par Cyril, qui a connu Yann Moix en classe de CM1. L'écrivain de 51 ans, aujourd'hui devenu le parrain de son fils, en a pris des "roustes". "Yann l'ignorait, mais inquiet pour lui, je collais l'oreille à leur porte et j'entendais ses cris, ses hurlements déchirants, les coups et les insultes de son père qui pleuvaient... Le lendemain immanquablement je repérais les marques violacées sur ses bras, ses cuisses, son dos, des traces de lacération, parfois des bleus sur son visage. Ou des résidus de sang séchés, mal nettoyés !", se souvient Cyril avec effroi. De son côté, le jeune Yann, interrogé sur ces traces, restait évasif et "prétendait s'être battu avec ce gars de l'école qu'on appelait Nounours".
Ces coups et ces réprimandes, les professeurs les voyaient "mais n'intervenaient pas". D'ailleurs, à cause de l'enfer vécu à la maison, "il arrivait à Yann régulièrement de déféquer dans son pantalon à l'école". "Il amenait toujours avec lui un sac plastique contenant des affaires de rechange. C'était visible", poursuit-il. Et d'évoquer à son tour le jour où Yann Moix est arrivé en classe en pyjama, "avec sa barre d'Ovomaltine". "Le professeur n'a pas posé de question, juste jeté sur lui un regard que j'ai trouvé sournois", ajoute-t-il.
Enfin, concernant la relation fraternelle de Yann et Alexandre, Cyril assure qu'ils "se sont toujours détestés". "Je n'ai jamais eu vent que Yann l'ait maltraité. Je crois qu'Alexandre cherche surtout à défendre ses parents. Je crois qu'il en veut à Yann de l'avoir éclipsé, déclare-t-il. Et que Yann lui en veut de l'avoir souvent dénoncé à son père, provoquant sa colère et les coups. Vers l'âge de 30 ans, un jour, Yann m'a tout raconté de ses supplices. Et cela ressemblait à Orléans."
Deux témoignages qui font froid dans le dos...