Coup de tonnerre dans le monde du septième art ! Le réalisateur japonais Hayao Miyazaki, 72 ans, arrête le cinéma, a annoncé dimanche 1er septembre à Venise Koji Hoshino, le président du studio japonais Ghibli (créé en juin 1985 par Hayao Miyazaki et Isao Takahata). Le maître du film d'animation, qui n'a pas pu se rendre au festival du film de Venise cette année, donnera prochainement une conférence de presse à Tokyo.
Un dernier film à Venise...
La retraite de Hayao Miyazaki, dessinateur, écrivain, cinéaste, animateur, poète et producteur, surviendra après la Mostra de Venise où son dernier film, Kaze Tachinu (Le vent se lève) est en compétition pour le Lion d'or. Son onzième long métrage, applaudi à l'issue de sa projection à la Mostra, est déjà sorti cet été au Japon, où "il rencontre un très grand succès" selon Koji Hoshino. Il est programmé en France pour début 2014. L'histoire, inspirée d'un roman de l'écrivain japonais Tatsuo Hori, est celle de de l'ingénieur japonais Jiro Horikoshi, connu pour avoir créé l'avion de chasse Mitsubishi A6M, surnommé Chasseur Zero et devenu le symbole de la lutte aérienne du Japon durant la Seconde Guerre mondiale.
... qui n'est pas épargné par la polémique
Le sujet abordé par Kaze Tachinu a cependant fait naître des polémiques. Passionné d'aviation, Hayao Miyazaki s'est attaché à une personnalité restée célèbre dans l'Histoire pour avoir conçu un appareil utilisé dans l'attaque japonaise sur Pearl Harbour en 1941 puis pour les opérations suicides des kamikazes. Or, comme l'explique Le Monde, "le Zero reste associé à la sombre période du militarisme nippon des années 1930-1940. Ce n'est pas un hasard si un exemplaire de cet avion accueille le visiteur du Yushukan, le musée au contenu à forte tonalité révisionniste installé dans l'enceinte du controversé sanctuaire Yasukuni (Tokyo), qui vénère les âmes des Japonais morts au combat et de dirigeants nippons reconnus coupables de crimes de guerre." Une promotion délicate pour les pays voisins, notamment en raison des relations tendues entre le Japon avec la Corée du Sud et la Chine.
Artiste engagé et intransigeant
Pour l'heure cependant, l'annonce de la retraite de Hayao Miyazaki entraîne inévitablement l'envie de se remémorer l'oeuvre de l'artiste, couronné par un Lion d'or à Venise en 2005 pour l'ensemble de sa carrière. Un parcours qui a débuté dès les années 1960, mais le monde entier prendra la mesure de son talent à la fin des années 1990, avec la sortie internationale de Princesse Mononoké en 1999. Parmi les thèmes qu'il privilégie dans ses oeuvres, la relation de l'humanité avec la nature, l'écologie et la technologie, ainsi que la difficulté de rester pacifiste dans un monde en guerre.
Face à l'empire impitoyable de Mickey, Hayao Miyazaki a réussi à imposer ses convictions, comme on l'apprend dans Les Inrocks : "L'alliance avec Disney, distributeur mondial des films Ghibli, pouvait laisser craindre la fin de la belle indépendance du studio japonais. Une telle idée fait doucement ricaner Miyazaki. Il suffit d'ailleurs de voir Le Voyage de Chihiro, premier film Ghibli issu du 'deal' Disney, pour vérifier l'intransigeance légendaire de Miyazaki. C'est sans doute le film le plus japonais qu'il ait réalisé, avec la volonté de renouer avec les racines de la culture nippone, jusqu'au risque de l'hermétisme. Un risque dépassé, puisque le triomphe du Voyage de Chihiro au Japon fut prolongé par un accueil enthousiaste dans le monde entier."Le père de Porco Rosso, Totoro, Chihiro ou encore Ponyo a reçu de nombreuses récompenses dont l'Oscar du meilleur film animé en 2003 pour Le Voyage de Chihiro, oeuvre qui avait déjà été honorée deux ans plus tôt d'un Ours d'or à Berlin.