Jamel à la Fête de l'Huma : 'Je suis l'un des Arabes les mieux lotis de France'

Comme tous les ans, le parc de la Courneuve s'est transformé pour la Fête de l'Huma. Ouverte le vendredi 13 septembre, elle a enflammé la ville aux rythmes des discours politiques, de la musique mais aussi de spectacles comiques. Jamel Debbouze était inévitablement la star de cette édition, livrant son show enthousiaste, Tout sur Jamel, devant 80 000 personnes.

Une ode à la démocratie

Mettons de côté le débat sur fond d'élections municipales, entre le PCF et son partenaire du Front de gauche. Le public a pu applaudir et rires aux blagues de Jamel Debbouze, sous le regard attentif et tendre de son épouse, mère de ses enfants Léon et Lila, la journaliste Mélissa Theuriau. L'artiste a livré, lors d'une longue interview accordée au quotidien L'Humanité, une ode à la démocratie et aux valeurs de la démocratie, évoquant évidemment le vote : "On peut voter pour changer les choses. Et c'est gratuit !"

L'humour est omniprésent lors de cet entretien, mais Jamel compte bien faire passer son message. Celui d'un enfant de Trappes qui n'avait rien pour réussir, handicapé de surcroit après un accident. L'acteur prend soin de préciser qu'il ne veut pas s'embourgeoiser : "Je reste en phase parce que j'ai de la sollicitude pour le monde qui m'entoure. Je viens de la misère. Je me dois de raconter ce que j'ai vécu." Tout en reconnaissant : "Je suis l'un des Arabes les mieux lotis de France, j'en suis très conscient."

Un homme engagé

Son engagement se fait à travers différents moyens : être président du jury du prix de l'audace artistique et culturelle, s'impliquer dans le cadre du programme "Improviser pour le Trophée " ou bien sûr, avec ses films : "Je viens de finir un film, La Marche [en salles le 27 novembre], de Nabil Ben Yadir, qui sortira au mois d'octobre, qui raconte ce qu'on a appelé la Marche des beurs, qui a eu lieu en 1983. C'était une marche pas seulement pour les beurs, mais pour l'humanité, l'égalité, et contre le racisme. Faire le bilan de l'intégration et du racisme en France, trente ans après, c'est très intéressant. C'est naturel pour moi de faire Indigènes ou La Marche, des films où il n'y a pas de budget, qu'il est très compliqué de monter."

Un engagement qui lui vient de son passé. Adolescent, il ne se sent pas bien dans le système scolaire et ce sont ses parents et des profs de français le soutiendront : "Je venais d'avoir un accident, je ne pouvais plus bouger le bras. [...] Bizarrement, j'ai trouvé l'issue par l'école. Ceux qui m'ont sauvé sont des profs de français, qui subissaient comme moi le système, qui m'ont fait jouer Des souris et des hommes, de Steinbeck, m'ont fait dire L'Avare, Le Bourgeois gentilhomme. Ils m'ont réconcilié avec les mots et m'ont fait comprendre que ce n'était pas grave de faire des fautes d'orthographe." Parmi ceux qui ont cru en lui, Alain Degois. Il proposait aux élèves de participer à un atelier de théâtre d'improvisation. Jamel y est allé, Alain a insisté pour qu'il revienne. La naissance d'une vocation.

Éviter le misérabilisme

Jamel Debbouze veut éviter le misérabilisme et, s'il critique son pays, il lui rend hommage également : "On était tous dans la merde et nos parents ont fait un travail magnifique pour que jamais on ne s'en rende compte. On est en France, un pays extraordinaire quand même, où les choses sont possibles. Évidemment, quand tu habites en banlieue, c'est beaucoup plus dur. Si je m'étais laissé faire, j'étais un Arabe handicapé d'1,65 m. Je n'intéresse personne sur le papier, personne. [...] Quand on n'a rien, on déploie une énergie considérable."