La 87e cérémonie des Oscars a eu bien involontairement un fil conducteur très politisé. Cette édition 2015 aura servi de grandes d'émotions, des discours émouvants et engagés, et offert à quelques personnalités une tribune inespérée pour évoquer les maux de la société américaine.
Selma : Entre émotion et hommage
Point culminant de la soirée, l'interprétation sur scène du morceau original Glory, composé pour la bande originale du film Selma et interprété sur scène par Common et John Legend, aura ému aux larmes le Dolby Theatre. À l'instar d'un David Oyelowo interprète de Martin Luther King dans ce film, dont les larmes ruissellent après la bouleversante partition de John Legend et du rappeur Common, les Oscars retiendront Selma. Quelques minutes, Glory glane sans surprise l'Oscar de la meilleure chanson originale. John Legend, prenant le relais d'un Common poussant à honorer la mémoire de MLK, n'a pas hésité à se montrer offensif : "Nous vivons dans le pays où il y a le plus de gens incarcérés au monde, il y a plus d'hommes noirs derrière les barreaux aujourd'hui qu'il n'y en avait en esclavage en 1850", a-t-il déclaré.
Patricia Arquette et le girl power
Trop, c'est trop. Après avoir amassé les récompenses pendant de nombreuses semaines, l'actrice de Boyhood a choisi la scène du Dolby Theatre pour faire passer un message féministe. "Il était temps pour nous, il est temps pour les femmes, temps de réclamer plus d'égalité. Et c'est maintenant le moment de réclamer le même niveau de rémunération pour les femmes aux États-Unis", a-t-elle scandé, déclenchant une salve d'applaudissements nourris et une réaction immédiate et solidaire de Meryl Streep et Jennifer Lopez. Plus tard sur Twitter, c'est Emma Watson – dont la prise de position féministe a fait grand bruit – ou encore Lena Dunham qui réagissent et saluent le propos.
Un bémol néanmoins pour les observateurs, lorsqu'en salle de presse, Patricia Arquette surenchérit en demandant à ce que les minorités opprimées (les noirs, les gays) rejoignent sa cause. Alors que les leurs sont encore loin d'être "normalisées"...
Graham Moore, le combat continue
Le scénariste primé d'Imitation Game aura offert un autre grand moment d'émotion aux Oscars. Pendant son discours, le jeune auteur a évoqué sa tentative de suicide à l'âge de 16 ans, livrant une ode au courage et au destin qui finit par sourire à qui veut bien y croire. "Je voudrais prendre ce moment pour les jeunes qui pensent qu'ils ne sont pas à leur place. Vous l'êtes. Restez bizarres. Restez différents. Et puis quand ce sera à votre tour d'être sur cette scène, s'il vous plaît, passez le message", a-t-il déclaré, tout en rendant hommage à Alan Turing, mathématicien et héros gay dont le film raconte l'histoire, avec le désir que tous les homosexuels tués pour leur sexualité dans ces années de chasse aux sorcières soient graciés et leur honneur, rétabli.
Iñárritu et le Mexique
Sacré meilleur réalisateur pour Birdman, puis meilleur film, Alejandro Gonzalez Iñárritu a profité de la vitrine des Oscars pour monter au front et a appelé à un meilleur traitement des immigrés mexicains aux États-Unis, ainsi qu'à l'établissement d'un gouvernement "digne [d'eux]" au Mexique, avec pour appui, une jeunesse à mettre en avant.