Auréolée d'un prix au palmarès du 67e Festival de Cannes, mais hélas absente pour le recevoir, Julianne Moore n'aurait effectivement pas dû être sur la Croisette pour la cérémonie de clôture qui a vu Winter Sleep, le long métrage de Nuri Bilge Ceylan, sacré Palme d'or. L'actrice de Maps to the Stars, excellente et folle devant la caméra de David Cronenberg, a remporté son prix d'interprétation... par défaut.
Comme chaque année, l'après-Cannes révèle quelques petits secrets de coulisses sur les choix du jury de la compétition. Jane Campion, présidente de cette édition succédant à Steven Spielberg, n'y a pas coupé. Selon 20 Minutes, la réalisatrice néo-zélandaise et son jury voulaient récompenser une tout autre actrice que Julianne Moore. "Une majorité des voix s'était portée sur l'actrice turque de 28 ans Melissa Sözen, qui joue le rôle de Nihal, la jeune épouse du personnage principal de Winter Sleep", mais le règlement ayant changé il y a peu, il est désormais impossible pour un film de remporter plusieurs prix au palmarès. En 2001, le jury présidé par l'actrice norvégienne Liv Ullmann avait décerné le Grand Prix du Jury au superbe long métrage de Michael Haneke, La Pianiste, ainsi que les deux prix d'interprétation aux deux comédiens du film, Isabelle Huppert et Benoît Magimel. Un tel cas ne pouvant plus se présenter, Spielberg avait contourné le règlement l'an dernier, via une subtile manoeuvre, puisqu'il avait décerné la Palme d'or à La Vie d'Adèle d'Abdellatif Kechiche, soit le metteur en scène, mais également à ses deux actrices principales.
C'est donc Nuri Bilge Ceylan qui a remporté la Palme d'or, laissant son actrice principale sur le carreau. La comédienne n'ayant pas glané le prix d'interprétation féminine, ce dernier a fini par revenir au second choix du jury : Julianne Moore, l'excentrique et dépressive actrice hollywoodienne de l'hilarant brûlot Maps to the Stars, de David Cronenberg. Mais lors de la conférence de presse, Jane Campion n'avait d'ailleurs pas manqué de glisser un mot sur la jeune actrice turque, affirmant aimer "beaucoup ce personnage, qui montre bien que la femme idéale n'existe pas".
Un choix par défaut qui n'a rien de scandaleux et qui permet surtout de booster les chances d'une saison des récompenses pour l'actrice américaine qui a déjà été nommée quatre fois aux Oscars, mais a également été primée à la Mostra de Venise en 2002 pour Loin du paradis et à la Berlinale en 2003 pour The Hours.