Le grand reporter Göksin Sipahioglu, fondateur de l'agence Sipa, est mort
Publié le 5 octobre 2011 à 12:30
Par Nicolas N.
Göksin Sipahioglu à Istanbul, le 9 septembre 2006. Göksin Sipahioglu à Istanbul, le 9 septembre 2006.© Abaca
Göksin Sipahioglu à Paris, le 28 mars 2006.
Göksin Sipahioglu devient chevalier des Arts et des Lettres à Paris, le 2 septembre 2004. Jean-François Leroy, directeur général du Festival de photojournalisme de Perpignan, l'embrasse pour le féliciter.
Göksin Sipahioglu devient chevalier de la Légion d'Honneur des mains de Jacques Chirac, à Paris, le 19 janvier 2007.
Göksin Sipahioglu devient chevalier de la Légion d'Honneur des mains de Jacques Chirac, à Paris, le 28 mars 2006.
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Triste nouvelle pour le monde du journalisme. Le grand reporter et photographe Göksin Sipahioglu est décédé mercredi à l'âge de 84 ans. D'origine turque, il avait fondé l'agence Sipa à Paris en 1973, l'une des plus célèbres agences de photo. C'est un communiqué de Sipa qui annonce le décès de son fondateur qui avait revendu l'agence au groupe Sud Communications en 2001.

Göksin Sipahioglu se plaignait mardi de douleurs au ventre. Il est entré hier à l'hôpital américain de Neuilly-sur-Seine où il est décédé d'une occlusion intestinale ce matin. À ses côtés, la journaliste américaine Phyllis Springer, sa compagne depuis plus de 40 ans.

Né le 28 décembre 1926 à Izmir, en Turquie, Göksin Sipahioglu a d'abord commencé comme basketteur. Il a même fondé une équipe à Istanbul et il deviendra joueur international. S'en suit le service militaire et les études de journalisme. Ses premiers papiers portent évidement sur le ballon orange. Puis son obsession d'être le premier sur tous les coups le distingue de ses collègues. Dans une interview donnée au Monde en 1998, Göksin Sipahioglu détaille ces premiers scoops : "J'étais le grand journaliste en Turquie." En 1958, il est "le premier journaliste turc à entrer en pays communiste après la guerre". Hongrie, Pologne, Tchécoslovaquie. En 1961, il est "le premier journaliste occidental" à photographier l'Albanie de l'après-guerre. En 1962, il est "le seul journaliste" à entrer à Cuba durant la crise des missiles. En 1965, le premier journaliste turc à entrer en Chine. En 1968, à Prague, il est le "premier journaliste occidental à interviewer des soldats russes". Etc, etc...

En vendant ses photos, il connaît quelques déconvenues. Fonder Sipa est sa revanche, écrivait Le Monde en 1998. L'agence naît officiellement en 1973. Sa compagne Phyllis travaille avec lui depuis déjà de nombreuses années. Ceux qui ont collaboré avec lui se souviennent de son talent pour repérer celui des autres, de son travail acharné, de son sens aigu du journalisme. Jean-François Leroy, directeur général du Festival de photojournalisme de Perpignan, disait de lui qu'il est "le plus journaliste de tous les directeurs d'agence". Göksin Sipahioglu a dirigé son agence jusqu'en 2003. C'était un seigneur de l'info, toujours à l'affût d'un coup, il ne prenait jamais de vacances. Malheureusement, cette époque est révolue et les grandes agences en A comme Sipa, Sygma et Gamma ont toutes vues leurs fondateurs remplacés par des gestionnaires. Göksin a perpétué le plus longtemps possible une épopée romantique et familiale, alors que l'époque est dominée aujourd'hui par les stratégies industrielles. Les géants de la communication - Bill Gates avec son agence Corbis, qui vient de racheter Sygma - vendent les photos à des prix bradés (au grand dam des photographes !) afin d'inonder un marché très demandeur comme l'internet, mais où la qualité se meurt. Göksin disait : "Une bonne photo est une photo publiée. Si possible en couverture. Qu'elle soit prise, "volée" ou "récupérée" !" Il rappellait souvent une de ses convictions, qui choquait certains : "Le paparazzi est le fondement du métier, un vrai travail d'enquête. A condition de ne pas entrer dans les propriétés privées."

C'est un maître, un très grand du métier qui nous quitte... et pas seulement pour son mètre quatre-vingt dix. Nos pensées les plus sincères à Phyllis Springer, sa famille et ses amis.

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