Ça fait six mois qu'on n'a pas entendu parler de M.I.A, et ça commençait à nous manquer ! La brillante revendicatrice, Londonienne d'origine Tamoul (Sri Lanka) est une artiste hors norme. Tout ce qu'elle fait, elle le fait pour changer les choses, ou bien pour dérouter, pour choquer. Son talent est à l'image de sa beauté. Étrange mais évident.
M.I.A a 35 ans, elle a accouché après ses deux premiers albums, qui ont connu le succès après l'utilisation du titre Paper Planes (qui figure sur le deuxième album, Kala) sur la bande originale du chef d'oeuvre de Danny Boyle, Slumdog Millionaire, qui a râflé huit Oscars en 2009. Elle a donc ensuite donné vie à un petit bonhomme trop mignon, en février 2009, Ikhid est né. Son compagnon, le père du garçon, est le musicien Benjamin Brewer, fils du milliardaire Edgar Bronfman Jr, le PDG de Warner, l'héritier de la compagnie d'alcool Seagram, un milliardaire quoi. M.I.A est maintenant à l'abri. Une revanche sur sa vie pourrie. Chassée à l'âge de dix ans du Sri Lanka, elle s'installe avec sa mère et ses frères et soeurs à Londres, mais sans père, guerrier Tamoul qui a quitté le domicile familial très tôt. Ensuite, le succès arrivant, M.I.A, de son vrai nom Mathangi "Maya" Arulpragasam, s'exporte à New York, puis avec son compagnon à Los Angeles, pour voir grandir leur fils au soleil. Malheureusement, sa mère n'a pas le droit de poser le pied sur le sol américain, une des raisons pour lesquelles M.I.A est si revancharde.
En juin 2010, elle sort son troisième album, Maya. Pas le même succès, car trop novateur. Précédé par le scandale du clip du premier single, Born Free, réalisé par le Français Romain Gavras (à qui l'on doit l'oppressant Stress de Justice), cet opus illustre bien l'état d'esprit dans lequel se trouve la chanteuse au moment de sa création. Parano et à bout de nerfs. M.I.A a déclaré lors d'une conférence de presse le 27 janvier dernier : "Mon dernier album était pourrave (...) Je comprend ce que les gens avaient dit sur ce dernier, qu'il craignait grave... Je l'ai réécouté l'autre jour, et j'avoue que je suis d'accord (...) Je sais que je ne serai jamais une artiste grand public. Je le comprends. Il est temps pour moi de retourner à mes fondamentaux."
Pour se relever de cet échec en demi-teinte, pour se prouver à elle-même qu'elle peut encore créer ce qu'il lui plaît, M.I.A a mis à disposition gratuitement sur internet le 31 décembre 2010, une mixtape étonnante. Appelée Vicki Leekx, un clin d'oeil évident à WikiLeaks, c'est une bonne dose d'inédits de la chanteuse toujours aussi politiquement investie et révoltée. Et pour illustrer cette mixtape, elle vient de publier trois clips. Elle a scindé Wiki Leekx en trois et a monté des images en reprenant l'esthétique volontairement kitsch et 2.0 de son dernier album Maya. Google Earth, des bandeaux Mac OsX, une foule en concert, et des images nocturnes de frappes chirurgicales de l'armée américaine s'enchaînent pour appuyer les propos incisifs débités par M.I.A. Les morceaux sont fameux, prometteurs d'un quatrième album au top, peut-être le chef d'oeuvre que l'on attend. Peut-être l'album parfait que l'on espère.
Le 24 février 2011, elle a participé au dîner et au concert de Duran Duran, juste avant de se rendre au défilé Versace, à Milan, en Italie. Elle a donc maintenant le droit de quitter les Etats-Unis. Car cela lui fut interdit pendant un certain temps. Pour fêter ça, elle a teint ses cheveux en blond. Toujours aussi lookée. Rappelez vous des Scream Awards de Spike TV à Los Angeles, le 16 octobre 2010, quand M.I.A apparaissait voilée intégralement dans une burqa à son effigie. Évidemment féministe, elle s'est frottée les mains en lisant les réactions des coincés le lendemain dans la presse.
Lundi 28 février 2011, un morceau inédit de M.I.A a fait son apparition sur internet. Le titre Zig Zag ne devait pas sortir, il était destiné à l'album Maya mais n'a pas été gardé. Ses producteurs ont tout de suite bondi, immédiatement la chanteuse a fait savoir qu'elle n'y était pour rien, qu'elle n'était pas coupable de cette fuite. Coutumière de révélations précipitées de titres inattendus, M.I.A a bien sûr été à nouveau soupçonnée lorsque le morceau Zig Zag a fait le tour du monde. Elle a écrit un mail pour rétablir la vérité et mettre fin à cette polémique : "Zig Zag est un titre de 2003. Je pense que c'est le producteur qui l'a révélé. Ce n'est pas ma chanson préférée, je n'ai d'ailleurs même pas de copie de cette dernière. Cette fuite ne vient pas de moi."
Un franc-parler qu'on adore, un paraître que l'on idolâtre, M.I.A est une icône qui restera.
Nicolas Derrstroff