Le monde de la photographie est en deuil. Mardi 26 novembre, le photographe américain Saul Leiter est mort. Selon son ami Roger Szmulewicz (directeur de la galerie 51 à Anvers), "Saul Leiter était malade". Il avait 89 ans.
C'est tardivement que Saul Leiter connaîtra le succès dans la photographie, notamment en se faisant le porte-drapeau de la couleur à l'heure où la critique et les spécialistes dressaient le noir et blanc en roi du genre. Né en 1923 à Pittsburgh (Pennsylvanie), ce fils d'un rabbin décide de devenir photographe après avoir vu l'exposition Henri Cartier-Bresson au célèbre MoMA de New York. À l'inverse de son père qui ne soutenait pas ses désirs artistiques, c'est sa mère qui lui offrit son premier appareil à l'âge de 12 ans.
Vivant à New York, passionné par la rue, Saul Leiter, Leica au poing, se met à photographier les rues de la mégalopole. Également peintre, il voit sa carrière basculer lorsqu'il découvre la couleur, à un moment où le procédé est loin d'être à la mode. Il poursuivra pourtant en noir et blanc, puisque son premier grand succès sera sa présence au MoMA dans l'exposition Always the young stranger. Mais très vite, carrière oblige, la rue deviendra secondaire dans son travail, demeurant une partie relativement méconnue. Il devient en effet photographe de mode, et ses clichés font le bonheur pendant trente ans de magazines comme Harper's Bazaar, Esquire, Vogue ou Elle.
Ce n'est qu'à la fin des années 1990 que son travail dans la rue appraît aux yeux du grand public, alors qu'il a cultivé sa passion avec discrétion. En 2006, ses premières photos en couleur sont exposées à la Howard Greenberg Gallery à Manhattan. Décrit comme atypique, Saul Leiter était "bougon, un peu dans son monde", confesse Agnès Sire, la directrice de la Fondation Henri Cartier-Bresson, qui lui avait consacré une exposition au photographe en 2008.
Un succès que l'intéressé n'avait lui-même jamais réussi à expliquer : "Je ne sais pas comment j'ai pris telle photo à tel moment ni pourquoi. Je ne sais pas si j'ai réussi à faire ce que je voulais : je n'ai jamais su ce que je voulais faire !"