Raphaël l'hérétique, chevauchant avec la Jeanne dans son nouveau clip signé Benchetrit, fustigeait dernièrement une France déprimante, abandonnée à son triste sort par ses fauteurs de troubles "partis en vacances" (tel "[s]on pote" Renaud)... Mais il n'est pas le seul "résistant" à refuser de rentrer dans le rang.
Au rayon contestataire, Toma fait son entrée. Celui que certains nomment encore Mr. Toma, témoignage probant du fait qu'il a su se faire un nom avec son premier album (Mon identité), "manifeste" à nouveau son talent, après un long silence, avec un nouveau morceau dont le clip fait le buzz : pour Non non non, c'est au coeur d'une authentique manifestation parisienne que le chanteur s'est incrusté et a mis en scène ses lignes rebelles.
Rien à voir, dans ce titre, avec la légèreté désuète et la désinvolture du morceau homonyme signé Camélia Jordana. Le Non non non de Toma assène la désapprobation et assoit la contestation en lui donnant de l'élan à coups de "nan, nan, nan, nan", reprenant et affrontant un certain nombre d'exemples de radicalisation - les premières lignes en fournissent une illustration suffisante : "Paraît qu'on est des fainéants/Faudrait qu'on travaille plus/Paraît qu'les jeunes sont tous méchants/Faudrait les embarquer plus". Si vous ne l'avez pas encore entendu, ni scandé, on vous laisse découvrir par vous-même le refrain insoumis...
Derrière cette sorte d'hymne résistant et l'actualité qu'il porte en lui, c'est le retour de Toma qui se dessine. Un retour aux allures de nouveau départ, avec un second album qui a tout d'une pierre fondatrice dans le parcours de l'artiste : Les Bâtisseurs de France. Car on nous signale qu'il a préféré "recommencer à zéro", avec une confiance et une attention essentielles dans le couple authentique guitare-voix : "J'ai repris cette vieille guitare que j'ai depuis l'âge de 6 ans et j'ai tout recommencé. J'ai écrit, réécrit, travaillé les accords, ça a été très dur. Mais il fallait que les chansons fonctionnent d'abord en version guitare-voix, c'est la base", fait valoir l'intéressé.
Portés par une voix chaleureuse et militante dont le rauque et les cassures peuvent évoquer sans ombrage l'éclectique Anis et Riké (de Sinse) - deux autres ciseleurs de verbe (surtout l'un) et de rebellion (surtout l'autre) -, les mots et les rythmiques de Toma s'imprègnent de ses affinités certaines avec le rap, seul modèle de contestation musicale encore vivant, le reggae, la chanson française, les grands songwriters américains... Regardant "plus loin que le bout de sa plume", il lui imprime des mouvements vifs et sincères, faisant naître des mots sans esbroufe et un personnage sans "posture" ni "decorum" - à vérifier sur scène (dates sur le Facebook officiel de Toma et sur son MySpace, où vous pouvez découvrir d'autres extraits de son album).
Le guitariste et accompagnateur de haut vol Romy Chelminski (Patrick Bruel, Christophe Willem...), Régis Cécarelli à la batterie, Laurent Vernerey à la basse, Benjamin Constant, et l'Orchestre national de Paris en fond sonore l'ont finalement aidé à fondre sans artifices humeurs et humour dans Les Bâtisseurs de France. Un manifeste turbulent contre les "bêtisseurs"...
G.J.