A peine sorti, Pacific 231, le nouvel album de Raphaël, s'adonne à la ferveur populaire et s'expose à la vindicte des censeurs et des critiques. Images et paroles, tout est fait, revendiquant l'intérim d'un "pote Renaud parti en vacances" et dessinant dans le verbe poétiquement résistant la statue du commandeur Bashung, pour titiller les consciences, avec les risques que cela implique.
Signe avant-coureur des remous provoqués par Le Patriote, chanson-étendard de Pacific 231, Raphaël avait vu le clip réalisé pour lui par Olivier Dahan (déjà aux manettes pour ceux de Caravane, Le Vent de l'hiver, Ne partons pas fâchés) sur la chanson Le Bar de l'Hôtel partiellement privé de diffusion par M6, la chaîne ayant jugé la superbe proposition visuelle trop offensante.
Rompu à la fréquentation des cinéastes de premier ordre pour l'illustration clipée de ses chansons (outre Dahan, citons Audiard et Assayas), l'époux de Mélanie Thierry et père de leur jeune Roman, qui fait ses débuts au grand écran dans Ces Amours-là de Claude Lelouch, s'est attaché les services de l'excellent Samuel Benchetrit pour le clip de la chanson Le Patriote.
Une chanson qui vient de faire l'objet d'une dénonciation pour plagiat, et dont le motif a été largement commenté : avec sa diction disloquée, Raphaël y stigmatise une certaine France déprimante peuplée de Français désolants et en fait un "débat captivant". Chevauchant, dans un mélange d'insolence désinvolte et de lascivité (pour preuve, ses mains baladeuses sur la poitrine et les flancs de la Pucelle), la statue équestre de Jeanne d'Arc place des Pyramides à Paris, Raphaël énumère les griefs, de politiques fascisantes en abêtisation des jeunes générations, en passant par la démago ambiante. Démago à laquelle lui-même cède d'une certaine façon avec ce texte, qu'il met en scène devant la caméra au poing - pour un effet "acte subversif" - d'un Benchetrit dont on rappellera qu'il fut en 2009 lauréat du prix du roman populiste pour Le Coeur en dehors.
Pour compléter le tableau, il aurait suffi que la police se pointe pour le déloger de sa monture... Va sans crainte, Raphaël : de nos jours, plus de bûcher pour les hérétiques.
G.J.