Pour trois semaines d'effervescence olympique, combien d'années de travail, d'abnégation, d'espoirs, de désillusions, de trajectoires et d'histoires différentes...
Celle de Steven Holcomb est à ranger au rayon des belles histoires : l'Américain, qui vient de glaner deux médailles de bronze aux JO de Sotchi dont une historique en bob à deux, revient de loin. Rescapé d'une tentative de suicide, il s'est confié au magazine People sur ses heures les plus sombres.
En 2007, alors que sa carrière dans le monde du bobsleigh est en plein essor et qu'il grimpe vers les sommets de la hiérarchie américaine, l'ascension de Steven Holcomb subit un coup d'arrêt quand une maladie dégénérative de l'oeil, qu'on lui a initialement diagnostiquée en 2002 (il sera établi plus tard qu'il s'agit d'une kératocône, qui se traduit par la perte de la sphéricité de la cornée, entraînant des distorsions de la vue), s'aggrave et se met à contrarier tant sa vie quotidienne que sa pratique sportive. il multiplie les consultations et les avis médicaux, en vain. L'athlète, qui a été réformé l'année passée de l'armée américaine après avoir servi durant sept ans et récolté moult médailles honorifiques, s'enfonce alors dans la dépression - et la cécité. Un soir de 2007, il avale 73 pilules médicamenteuses, qu'il fait descendre à coups de Jack Daniels, décidé à en finir avec la vie. La suite, le champion de 33 ans la raconte : "Je me suis réveillé le lendemain matin, j'ai pris conscience de ce que j'avais fait, et j'ai décidé que j'avais besoin d'aide pour me battre."
Quelques mois plus tard, il se soumet à un traitement alors expérimental, à base de gouttes (une solution vitaminée), de rayons UV et de lentilles de contact spéciales, posées par le biais d'une intervention chirurgicale spécifique (C3-R, rebaptisée en 2010 "Holcomb C3-R" en l'honneur du patient zéro). Un miracle. "Je voyais, au sens propre, le monde d'une manière complètement nouvelle", se remémore-t-il avec émotion. "C'est comme la vie en haute définition", avait-il témoigné ailleurs. Et de remarquer, quant à son épisode suicidaire : "J'ai compris que Dieu avait de plus grands desseins pour moi. Ce n'était pas mon heure. J'avais encore des choses à faire dans ce monde." Il reprend le bobsleigh avec une motivation démultipliée, truste les podiums des compétitions internationales et démontre qu'il avait effectivement de grandes choses à accomplir en emmenant le bob à quatre décrocher l'or aux JO de Vancouver en 2010, mettant fin à 62 ans de disette américaine dans la spécialité.
En lice à la fois en bob à deux et à quatre aux JO de Sotchi, Steven Holcomb a récidivé lundi dernier en allant chercher, avec son partenaire Steven Langton, la médaille de bronze en bob à deux, derrière les intouchables Russes et les Suisses. La première médaille du bob à deux américain en... 62 ans. Ce dimanche 23 février, à quelques heures de la clôture des Jeux de Sotchi, il a ajouter encore un peu de bronze à sa belle histoire en terminant 3e de la finale de bob à quatre avec ses partenaires Steven Langton, Curtis Tomasevicz et Christopher Fogt. Il va pouvoir retourner comblé à ses études en sciences de l'informatique (diplôme prévu en 2016) et à sa vie, si belle en HD.