Tous les titres de l'artiste invitent avec chaleur à se réunir autour d'une seule et même cause : l'amour de son prochain. Alors qu'Enrico Macias célébrait en 2012 ses 50 ans de carrière, il se lance dans une nouvelle épopée musicale avec son fils Jean-Claude Ghrenassia, ex-musicien de jazz.
Dans une interview accordée à nos confrères du Parisien, il évoque la complicité fusionnelle qui l'unit à son fils, devenu son partenaire et arrangeur de ses albums. Une seconde réalisation familiale après le succès en 2006 de l'album Oranges amères. Un magnifique disque – où l'on redécouvrait Enrico ambassadeur de la musique arabo-andalouse, élégante et voyageuse – encensé par le public et la critique.
Une aventure qui permet de fédérer père et fils autour d'une passion commune : la musique. Pourtant, le chemin fut long avant de s'engager dans une première collaboration. "Notre première collaboration n'a pas été facile pour moi, raconte le chanteur. J'avais l'habitude de m'assumer tout seul. Soudain, Jean-Claude me disait : 'Il faut jouer comme ci, chanter comme ça.' Je lui répondais : 'Mais je suis ton père, quand même !'" Un parcours périlleux également pour Jean-Claude qui confie : "Il fallait que je fasse mes preuves ailleurs pour avoir de la crédibilité à ses yeux. La musique, pour moi, c'était un luxe, ça n'était pas acquis."
Malgrè ses études de droit, Jean-Claude a toujours été transcendé par cet univers. Enfant, il fut le spectateur d'un monde enchanté. Enrico se souvient encore : "Rappelle-toi, tu ne parlais pas encore que tu avais une pile de 45 tours avec un tourne-disques et on te demandait : 'Mets Marie Laforêt.' Tu triais à toute vitesse et tu le trouvais." Et Jean-Claude de répondre : "Je me souviens de Johnny et Mort Shuman qui passaient à la maison, de Mike Brant qui a habité un moment chez nous. Ce que j'adorais, c'était les répétitions dans notre grand appartement. J'avais 5-6 ans, je rentrais de l'école et il y avait un orchestre qui jouait dans le salon. C'était génial. J'étais attiré par les instruments." Une mélodie qui sonnait comme un murmure et qui l'a conduit à devenir tour à tour musicien de jazz, arrangeur et directeur artistique chez EMI.
Désormais, l'élève a en quelque sorte dépassé le maître : "Maintenant, en studio, je suis son fils et il est mon père", s'exclame l'artiste. Dans le nouvel album, une chanson évoque Suzy, la femme d'Enrico et la mère de Jean-Claude, disparue en 2008. "C'est une chanson écrite par Bruno Maman, qui n'est pas dans le pathos", souligne Jean-Claude Ghrenassia.
"Mon père a ma mère dans la tête 24 heures sur 24. Et ce morceau, c'est la douceur du souvenir plutôt que la tristesse du deuil." Tout au long de sa belle carrière, les chansons d"Enrico furent évocatrices de son attachement pour sa famille, le souvenir de sa terre natale et la culture de l'exil. Une douleur qui est toujours aussi vivace, lui qui fut longtemps choqué par l'assassinat en 1961 de son beau-père, Cheikh Raymond, grand musicien français d'Algérie.
Désormais, l'artiste soutient au détour de son autobiographie, L'Envers du ciel bleu, sortie en octobre dernier, vouloir finir ses jours en Israël. Non pas pour fuir le climat actuel en France et le retour des heures sombres de l'antisémitisme, mais parce qu'il souhaite mourir sur la terre de son peuple. Fervent partisan de la paix, le musicien prépare actuellement une tournée en Israël, Égypte, Turquie. "Je n'ai pas peur de chanter. J'accompagne mes mots par des actes, je vais jouer dans les endroits les plus chauds." Il se produira également en France et offrira un concert à ses fans le 8 janvier 2017 à l'Olympia de Paris.
Stéphanie Laskar