"Vous savez, il y a un truc incroyable à Ramatuelle : c'est le lieu. Le théâtre. Le théâtre est incroyable. Moi, j'en ai fait des spectacles en plein air dans ma vie, mais la première fois que j'ai joué à Ramatuelle, en 1985 ou 1986, je suis tombé par terre d'amour pour cet endroit, tellement c'est bouleversant. [Interview RTL, juin 2017]" Neuf ans après avoir pris la direction artistique du Festival de Ramatuelle, Michel Boujenah est toujours aussi exalté par le cadre exceptionnel qu'offre, là où il n'y avait autrefois qu'un "modeste champ entrecoupé de restanques et semé de hauts murets", le site de la manifestation.
Havre de quiétude à quelques hectomètres d'une Saint-Tropez plus frénétique que jamais au coeur de l'été, Ramatuelle et son théâtre à ciel ouvert à l'atmosphère intimiste (capacité : 1200 places) accueillent pour cette saison 2017 (du 31 juillet au 11 août) une programmation encore une fois éclectique et audacieuse : de la musique, de Julien Doré à Michel Jonasz et Véronique Sanson, du théâtre, de Les Chatouilles ou la danse de la colère à A droite à gauche, du rire aussi avec la carte blanche octroyée au Point Virgule...
En préambule, "Les Nuits Classiques", sous la houlette de leur directeur Laurent Petitgirard, avaient investi les lieux le temps de trois soirées de grande musique sous les étoiles : d'abord (le 27 juillet) avec l'Orchestre de Nice, avec pour invité le violoncelliste Marc Coppey pour interpréter le concerto pour violoncelle et orchestre de Dvorak ainsi que la 7e symphonie de Beethoven ; ensuite (le 28) avec Natalie Dessay interprétant un répertoire dessinant un portrait de l'Amérique dans Pictures of America ; enfin (le 31) avec la virtuosité de la pianiste Anne Queffélec.
Ce soir-là, Jacqueline Franjou était heureuse de prendre brièvement la parole pour l'inauguration officielle de cette nouvelle édition du rendez-vous qu'elle a créé ex nihilo en 1985, alors qu'elle était conseillère municipale et vice-président de l'Office de Tourisme, avec la complicité du regretté Jean-Claude Brialy. Dix ans après sa mort, un hommage sera d'ailleurs rendu cette année au comédien, qui fut le directeur artistique de l'événement jusqu'à sa disparition le 30 mai 2007 : "En plus des hommages à Gérard Philipe et Anne Philipe, des pastilles vidéo de trois ou quatre minutes, réalisées en collaboration avec l'INA, seront diffusées tous les soirs avant chaque spectacle", a ainsi indiqué Jacqueline Franjou au Figaro. "Je suis très heureuse de concrétiser ce projet d'hommage. Je tenais à perpétuer la mémoire de Jean-Claude. Au théâtre, on a une tradition qui veut qu'on dise toujours des mots différents. Je n'ai jamais oublié les mots de Jean-Claude, et ils étaient tous différents", se félicite-t-elle, annonçant également "une exposition de photographies avec une bande-son de la voix" de Jean-Claude Brialy.
Jean-Claude Brialy s'est "absenté" et nous regarde, en tout cas je l'espère...
Suite à la disparition de ce dernier, Michel Boujenah avait repris le flambeau avec beaucoup d'enthousiasme : "C'est ce que Jean-Claude aurait voulu, j'en suis sûre. La fraternité méditerranéenne", fait valoir Jacqueline Franjou. Un choix opportun, ne serait-ce qu'au vu de l'énergie et l'enthousiasme du comédien pour composer une programmation éclectique et populaire, et accueillir tous les publics - "les gens du coin, qui habitent ici ; les vacanciers aisés ; les vacanciers pas aisés". Interviewé par RTL au mois de juin, il partageait sa vision pour le Festival de Ramatuelle : "La ligne éditoriale que j'essaye de tenir, c'est de montrer que le spectacle vivant ce n'est pas "ça ou ça". C'est "ça et ça". Il y a des tas de choses tout à faire différentes qui peuvent cohabiter dans le même festival. Je peux tout programmer. Et j'offre au public un petit exemple de choses différentes qui existent dans ce pays. Et c'est la somme de ces choses-là qui font le regard qu'on a sur nos artistes."
Et autant de belles histoires... Ce soir, c'est Julien Doré qui ouvre le bal. "Prenons son cas : je n'osais même pas lui demander de venir à Ramatuelle : on n'a que 1 200 places. Et j'apprends par une amie qu'il rêve de faire Ramatuelle. (...) Christophe Maé, un jour je le croise à un concert, il était spectateur, il me dit : "J'adorerais venir à Ramatuelle"", relate Boujenah, fier de la "fascination" que le lieu exerce tant sur les artistes que le public.
Evoquant au cours du même entretien la venue de Michel Drucker, programmé avec son seul-en-scène, Michel Boujenah a également lui aussi une pensée délicate pour Jean-Claude Brialy : "Drucker qui vient alors qu'il était très lié avec Jean-Claude Brialy. Ça fait dix ans que Jean-Claude est parti, enfin : s'est absenté. Dans un endroit où on ne peut pas le voir, mais vraisemblablement lui nous voit, en tout cas je l'espère."
Et ainsi le Festival de Ramatuelle continue d'être le théâtre de belles histoires...
Programmation et infos sur le site officiel du Festival de Ramatuelle.