Vendredi, pour la première fois, Gérald Darmanin a été confronté devant une juge d'instruction à la femme qui l'accuse de viol depuis 2017 au tribunal judiciaire de Paris. Le ministre de l'Intérieur, placé à la mi-décembre sous le statut de témoin assisté dans ce dossier, est accusé de viol, harcèlement sexuel et abus de confiance. Le 13 mars 2021, la confrontation avec son accusatrice Sophie Patterson-Spatz a duré environ neuf heures.
Dans un communiqué transmis à l'AFP peu avant 23h30, les avocats du ministre de 38 ans, Me Pierre-Olivier Sur et Me Mathias Chichportich, se sont réjouis qu'"à la fin de cette confrontation, Gérald Darmanin reste sous le statut de témoin assisté", ce qui constitue selon eux la "preuve qu'aucun indice grave ou concordant d'une quelconque infraction ne lui est reproché". Sollicitées par l'AFP, les conseils de Mme Patterson-Spatz n'ont de leur côté pas répondu.
L'enquête sur ces faits datant de 2009 a été reprise cet été par une juge d'instruction, à la suite d'une longue bataille procédurale. La magistrate a placé M. Darmanin le 14 décembre sous le statut de témoin assisté, un statut pouvant évoluer au cours de la procédure vers une mise en examen si la magistrate réunit des "indices graves ou concordants".
En mars 2009, la plaignante s'était adressée à l'élu, alors chargé de mission au service des affaires juridiques de l'UMP (ancêtre de LR), pour tenter de faire réviser une condamnation de 2004 pour chantage et appels malveillants à l'égard d'un ex-compagnon. Selon elle, M. Darmanin lui aurait fait miroiter son appui auprès de la Chancellerie via une lettre, en échange de faveurs sexuelles qu'elle aurait acceptées, se sentant contrainte de "passer à la casserole", selon son expression devant les enquêteurs.
Elle dépose plainte une première fois en juin 2017, classée sans suite par le parquet de Paris car la plaignante ne répond pas aux convocations des enquêteurs. En janvier 2018, une enquête est ouverte suite à une nouvelle plainte de Mme Patterson-Spatz. Celle-ci est entendue trois jours plus tard. M. Darmanin est lui convoqué en audition libre, et confirme avoir eu une relation sexuelle avec Mme Patterson-Spatz, mais selon lui librement consentie et à l'initiative de la plaignante: "Il n'y a eu aucune contrepartie". L'enquête est classée moins d'un mois plus tard pour "absence d'infraction".
En mars 2018, la plaignante dépose plainte avec constitution de partie civile, et élargit ses accusations : abus de confiance, extorsion de consentement sexuel, escroquerie au consentement sexuel, viol, harcèlement sexuel. Une juge d'instruction refuse en août suivant de reprendre les investigations, estimant l'enquête préliminaire suffisante pour écarter les accusations. Après de longs démêlés procéduraux, la cour d'appel de Paris a ordonné en juin 2020 la reprise des investigations sur cette accusation de viol, estimant que la magistrate instructrice "ne pouvait se fonder uniquement sur les résultats de l'enquête préliminaire" pour rendre un non-lieu avant toute nouvelle investigation. Depuis cet été, une nouvelle magistrate s'occupe du dossier.
"Il faut quand même mesurer ce que c'est que d'être accusé à tort, de devoir expliquer à ses parents ce qu'il s'est passé parce que, c'est vrai, j'ai eu une vie de jeune homme", avait expliqué en juillet à La Voix du Nord, celui qui attend son premier enfant avec son épouse Rose-Marie. Gérald Darmanin, dont la nomination comme ministre de l'Intérieur avait été critiquée par des féministes, à cause notamment de cette affaire, a porté plainte pour dénonciation calomnieuse.
Avant la confrontation, plusieurs sources proches du dossier ont indiqué à l'AFP que la juge ne semblait pas convaincue que les faits puissent être pénalement qualifiés de "viol". Ce qui n'empêchait pas un proche de M. Darmanin de s'inquiéter récemment d'accusations qui pourraient durer, à cause de la longueur de la procédure et d'éventuels recours de part et d'autre, susceptibles de "plomber" sa carrière politique.
Une confrontation de neuf heures - c'est très long... - a du permettre de répondre à toutes les questions sur cette affaire qui date de 2009 et pour laquelle, la plaignante a, au fil du temps, élargi ses accusations.
Gerald Darmanin est présumé innocent jusqu'à la clôture de ce dossier.